C’est une particularité nipponne qui peut surprendre n’importe qui la première fois. Au Japon, on place le nom devant le prénom quand on évoque une personne, en particulier lorsqu’elle est populaire. C’est ainsi que l’on ne va pas dire Shinzo ABE comme beaucoup de journaux français (qui appliquent l’ordre français Prénom + Nom) mais ABE Shinzo.
Cette habitude est directement attachée à la formalité nipponne. La société japonaise est très formelle et emploie une certaine étiquette. Vous devez donc employer une manière respectueuse et polie de s’adresser à quelqu’un, ce qui s’amorce par la prononciation de son nom de famille avant celle de son prénom.
Mais cela ne s’arrête pas là. Vous devez aussi lier tout un tas de titres honorifiques spécifiques, qui sont soit connectés au nom de famille d’une personne, soit à son sexe, à son statut social ou encore à sa fonction.
L'histoire du nom de famille au Japon
Le concept du nom de famille est relativement nouveau pour l’entièreté de la population japonaise. C’est là un des aspects fondamentaux du relationnel nippon, et pourtant, les noms de famille n’existent que depuis 1868 pour le grand public. Auparavant, seuls les samouraïs possédaient leur propre nom de famille. La plupart des Japonais possédaient un prénom ainsi qu’une appellation de dénomination, le plus souvent relatif à leur lieu de naissance ou d’activité. Cela fonctionne de la même manière que Léonard de Vinci par exemple (Léonard né à Vinci en Toscane).
En 1868, après la restauration de Meiji, les Japonais ont d’abord été tenus de consigner des noms de famille dans le cadre de la création de cartes d’identité nationale. Cela découlait des efforts de modernisation d’avant-guerre. La société japonaise subissait de nombreux changements structurels sur les modèles des grandes puissances occidentales, et notamment la France, le Royaume-Uni, les États-Unis et l’Allemagne.
Pourquoi les gens s'appellent par leur nom de famille ?
Tout d’abord, commençons par en rassurer quelques-uns : certains Japonais s’appellent évidemment par leur prénom, sans aucun problème. Cela dit, cela nécessite une certaine intimité entre deux individus. En vérité, ce sont surtout les personnes qui ne se connaissent pas au bureau ou à l’école qui vont s’appeler par leur nom de famille. Lorsqu’on appelle quelqu’un par son nom de famille, on le perçoit avant tout comme le représentant d’un groupe. Cela signifie qu’il représente avant toute une famille, un clan, et non simplement une personne familière.
Ainsi, ce n’est pas une surprise que le nom de famille soit plus habituel au Japon. Le langage de la vie de tous les jours entre deux personnes tend vers le formel pour respecter l’individu. On emploie tout toujours le nom de famille d’une personne avec un suffixe honorifique générique tel que le -san (pour Monsieur / Madame). Cela permet à chacun de s’assurer qu’il reste poli et qu’il ne va pas offenser son interlocuteur.
Une personne que vous ne connaissez pas et qui s’adresse à vous immédiatement par votre prénom est très malpolie au Japon. Beaucoup décrivent cela comme une agression verbale. Pour se l’imager, on peut imaginer qu’une personne inconnue en France vienne directement mettre son bras autour de votre cou et vous taper sur la poitrine dans la rue. C’est un peu le même ressenti qui ressort lorsque l’on discute avec des Nippons.
Quand peut-on appeler une personne par son prénom au Japon ?
En règle générale, abstenez-vous d’appeler une personne japonaise par son prénom. Cela dit, il y a quelques exceptions, notamment lorsqu’elle vous a donné spécifiquement la permission de le faire. Ce qui arrive généralement lorsque vous êtes dans un environnement assez jeune, par exemple à l’école élémentaire ou au lycée. Les jeunes générations sont un peu moins attachées à cette idée de respect et de normes japonaises qui ne s’appliquent pas systématiquement quand l’on regarde du côté des États-Unis ou de l’Europe. Des camarades de classe ou des personnes proches de vous n’hésiteront pas à vous dire de les appeler par leur prénom. Mais il faut que l’intention émane d’eux.
Du reste, les gens qui sont nés dans la même famille s’appellent par leur prénom, sans surprise. Des frères et sœurs vont par exemple s’appeler directement par leur prénom sans passer par des suffixes honorifiques ou la mention du nom de famille. De même, si des amis deviennent des amants, ils vont s’appeler par leur prénom. La mention d’un titre honorifique tel que le -chan peut parfois être inclus, mais c’est davantage une sorte d’humour personnel que d’une formalité.
Pour résumer, le fait d’appeler quelqu’un par son nom de famille apparaît comme formel au Japon. En revanche, utiliser le prénom semble directement informel, décontracté et un peu trop amical. Cela gêne la majorité des Nippons qui préfèrent ne pas froisser un interlocuteur avec un langage trop direct.
Quels sont les suffixes que l'on peut utiliser ?
Nous avons rédigé un article complet sur les suffixes honorifiques japonais que nous vous recommandons de lire plus en détail. Cependant, voici un bref résumé des quelques titres que les Japonais emploient souvent. On place un titre honorifique après le nom de famille.
- San (さん) : il peut être utilisé pour les hommes ou pour les femmes, et est l’équivalent de notre Monsieur ou Madame en Occident. C’est le titre honorifique le plus utilisé est le plus générique. Si vous ne savez pas quoi mettre, employez cela.
- Sama (様, さま) : c’est la version formelle de -san. Elle est utilisée pour les clients pour désigner une personne avec un statut supérieur (socialement).
- Sensei (先生) : c’est un suffixe honorifique utilisé pour les médecins, les enseignants et toutes les personnes de l’enseignement supérieur. Les professeurs d’arts martiaux sont aussi également désignés avec ce titre.
- Chan (ち ゃ ん) : c’est un suffixe qui sert à s’adresser à des enfants, à des bébés et à de jeunes femmes dont vous êtes très proches.
- Kun (君, く ん) : c’est un suffixe qui sert à désigner un jeune homme comme un petit frère, un garçon ou des camarades de classe. C’est un peu l’équivalent du -chan pour le masculin.
Est-ce que les Japonais aiment les Français ?