Dans les mangas, dans les animes, dans les rues japonaises ou même dans certaines boutiques françaises, vous avez sans doute déjà aperçu ces très jolis bombers japonais. Ils s’appellent officiellement Sukajan (スカジャン) et aujourd’hui, vous allez apprendre toute leur histoire. Il s’agit d’un type de veste-chemisier qui a pour vocation d’être avant tout un souvenir.
On date l’origine du sujakan à la fin de la Seconde Guerre mondiale. En fait, c’est un élément de style qui est au carrefour de plusieurs influences : d’une part de la culture nippone avec le motif par-dessus, mais surtout des vestes de baseball américaines, des broderies et de la soie japonaise. Ce melting-pot a été popularisé depuis 1945 par les Américains et les Japonais. Depuis une dizaine d’années, les Européens l’ont peu à peu adopté, essentiellement grâce à leur amour pour le pays du soleil levant.
Un bomber qui est né grâce aux Américains
Si vous ne connaissez pas très bien l’histoire japonaise contemporaine, voici quelques éclaircissements rapides : premièrement, le Japon a perdu la Seconde Guerre mondiale après les deux bombardements atomiques sur Hiroshima et Nagasaki. Le pays du soleil levant a choisi de baisser les armes, sous la contrainte et la menace d’autres déluges sur des villes majeures. Ensuite, les Américains ont commencé une période d’occupation qui s’étendra jusqu’à 1952. À ce titre, le commandant en chef des forces alliées dans le Pacifique, le général Douglas MacArthur, devient gouverneur militaire du Japon après que celui-ci ait capitulé.
C’est à peu près à ce moment-là que l’on peut dater les origines du Sukajan. D’après les sources, les restes des cas de parachutistes furent employés par des soldats américains afin de créer des vestes légères, semblables aux fameux teddys que l’on trouve un peu partout aux États-Unis. Vous savez, ce sont ces célèbres vestes (parfois appelé varsity jacket) iconiques des universitaires américains ! Si vous avez déjà regardé la série de films High School Musical, vous voyez sans doute de quoi nous parlons…
C’est donc avec des restes de cap de parachutistes inutilisés que les soldats se mettent à confectionner de nouvelles vestes un peu plus légères. Dans un premier temps, ils y ont ajouté quelques motifs issus de l’aspiration militaire américaine. Puis, très vite, on a retrouvé des éléments de culture américaine et japonaise, souvent via de la couture. Le plus gros de l’espace disponible était dans le dos, c’est ainsi dans cet espace-là que des figures folkloriques comme des démons ou des animaux ont été dessinés. On peut d’ailleurs faire un rapprochement entre le style graphique de ces créations et la technique du tatouage.
Une véritable mode apparaît
Si l’on peut dater la création des premières vestes sukajan à la fin de la Seconde Guerre mondiale, la popularité vient surtout avec le film Pigs and Battleships (豚と軍艦, Buta to gunkan) en 1961. Ce long-métrage dépeint les échanges sur le marché noir entre l’armée américaine et la pègre locale à Yokosuka. Dedans, on y aperçoit plusieurs vestes sukajan, si bien que le film va engendrer une véritable mode à ce niveau-là. C’est le mouvement sukaman, qui se distingue toutefois avec un petit changement dans le style visuel des vestes : en plus de la base militaire (surtout celle de Yokosuka), on y incorpore des éléments du style civil.
Bien sûr, ce sont plutôt les jeunes qui s’intéressent et qui portent des sukajan. En plus de la veste, on y associe souvent des costumes à un bouton confectionnés par des tailleurs locaux. L’ensemble s’enfilait également avec une coupe de cheveux à l’américaine (visualisez celle d’Elvis Presley, par exemple). Au final, c’est dans ces années-là (les années 60) que ce type de veste finit par être commercialisé à grande échelle dans les boutiques du pays, et avant tout va Yokosuka (la vie du film). Il faut vraiment concevoir cette mode comme un élément de style associé à une jeune génération rebelle qui ne trouve pas sa place dans un pays en reconstruction. On est donc sur le cas d’un vêtement de bad-boy !
Plus récemment, on découvre surtout ce type de vêtements dans les jeux vidéos comme la série des Yakuza de Sega, ou bien dans les animes (avec par exemple Tokyo Revengers). Aujourd’hui, elle est davantage portée comme un classique local, une sorte de décoration qui est un élément de mode. C’est un objet souvenir d’abord pour les touristes, même si certains Japonais le conservent comme une composante de base de leur garde-robe. Devant la popularité de la chose, on observe une tendance depuis le début des années 2010 : plusieurs créateurs européens et japonais de mode s’en emparent et proposent des dizaines de motifs différents dans leur collection de prêts-à-porter.
Vous en avez d’ailleurs sans doute vu dans des boutiques en ligne ou même dans certains magasins japonais : ces bombers japonais sont parfois en tissu ou en soie, et les motifs les plus incontournables sont le tigre, le serpent ou encore le dragon. C’est un vêtement doux, qui est toujours aujourd’hui associé à un style de mauvais garçon (bad-boy) et parfois de délinquants. On ne va clairement pas aller au travail au Japon ou en France avec une veste de ce type. Cela dit, c’est un magnifique objet de collection que vous pouvez ramener sans souci du Japon et qui vous fera un très beau souvenir…
Super intéressant ce mélange des influences américaines et japonaises du bombers sukajan qui offre un style si particulier, j’adore !