Au Japon, l’onigiri est une collation, un repas rapide, un déjeuner facile, bref, c’est l’une des bases de l’alimentation. On en consomme rapidement, sans vraiment avoir besoin d’une raison ou d’un événement. C’est un peu l’équivalent du sandwich chez nous. L’onigiri se compose traditionnellement de riz blanc nourrissant et d’algues salées (nori). Ce qui nous intéresse ici, c’est de savoir pourquoi les onigiri ont une forme triangulaire ! Et oui, pourquoi ne pas les avoir faits carrés, rectangulaires ou encore ronds ?
Pourquoi une forme triangulaire ?
En réalité, au Japon, l’onigiri peut se trouver sous quatre formes différentes. Cependant, le triangle est largement la plus courante, au point que très souvent, dans les représentations dans les médias populaires qui s’exportent à l’international comme le manga ou l’anime, on ne voit que des triangles. Mais parfois, il y a bien des œuvres qui montrent l’onigiri sous ses autres formes. On peut le trouver sous forme de rond, de disque, de sac de sable, et bien sûr de triangle.
À l’origine, la légende raconte que les voyageurs façonnaient des petites boulettes de riz en forme de montagne dans le but de demander protection contre les kami (les esprits japonais). Selon les pratiquants shintoïstes, la spiritualité prédominante au Japon, on trouve des esprits un peu partout, notamment dans la nature. Ces divinités ont donc une place importante dans l’esprit des Japonais et sont illustrées dans de nombreuses œuvres du studio Ghibli. Si l’on en revient à la forme de ce mets traditionnel, force est de constater que d’un point de vue pratique, l’aspect triangulaire est beaucoup plus efficace en termes d’espace, et donc de transport, par exemple dans une petite sacoche en cuir.
Si vous souhaitez en savoir plus sur les autres formes d’onigiri qui existent, voici un descriptif :
La forme de disque est assez particulière et provient surtout du Tohoku et du Chubu. Ce sont des onigiri arrondis, mais un peu aplatis au milieu, de sorte que leur emballage dans des feuilles soit plus pratique. Dans le Tohoku, on mange davantage d’onigiri grillés que dans d’autres régions du Japon. C’est une petite particularité qui peut avoir son importance si vous voyagez dans des milieux ruraux japonais.
La forme en rond est une véritable boulette de riz. Elle est fabriquée en roulant le riz entre les paumes et c’est la plus courante dans la région de Kyushu (au sud-ouest du Japon). On la trouve également dans certaines régions de Chubu, en complément de la forme de disque que nous avons vue plus tôt. L’onigiri en forme ronde est très certainement la deuxième forme la plus populaire. Il faut dire que c’est assez simple à réaliser, le geste étant plutôt naturel, même pour des enfants. La confection d’onigiri ronds a notamment été développée pendant l’époque Showa.
L’onigiri en forme de sac de sable : il faut bien imaginer l’objet. Derrière une forme un peu moins glorieuse, on gagne un petit aspect pratique, puisqu’il est plus facile d’enrouler autour de lui des algues assaisonnées. Au Japon, il est dit que cela proviendrait du palais impérial de Kyoto. On l’appelait, à l’époque, « omusubi ». Plus volumineux que les autres, il permet de concentrer le riz, et donc d’avoir des portions plus généreuses.
À quand remonte l'onigiri ?
La première trace d’une touffe de riz qui s’apparente vraiment à un onigiri a été retrouvée en 1987 dans les vestiges de Sugitani Chanobatake. On la fait remonter à la période Yayoi, qui correspond à environ -300 avant notre ère et jusqu’à 300 après notre ère. Les archéologues auraient découvert des empreintes de doigts humains sur les grains de riz, ce qui ne laisse pas trop de doute. On attribue la bonne conservation de cette touffe de riz à la carbonisation, qui a scellé l’artefact dans l’histoire. C’est ainsi que l’on commémore le jour où ce fossile a été découvert, c’est-à-dire le 18 juin de chaque année, comme la journée officielle de l’onigiri. Et oui, les Japonais ne manquent pas de créer des journées commémoratives pour certains événements culturels.
Si l’on se penche maintenant sur la question de la littérature, l’onigiri est apparu sous forme de riz de forme elliptique (tonjiki) dans le classique Le Dit du Genji (Genji monogatari). Cet ouvrage exceptionnel et très connu a été rédigé pendant la période Heian (794 – 1185). Beaucoup estiment que les tonjiki ont peu à peu évolué vers une forme triangulaire, afin de mieux convenir aux assiettes modernes.
Dans un contexte plus contemporain
Les onigiri ont toujours figuré parmi les premiers repas scolaires distribués aux étudiants. Par exemple, les tout premiers repas scolaires qui ont été mis en place dans la région de la préfecture de Yamagata étaient destinés aux étudiants les plus démunis. Bien sûr, il y avait l’onigiri parmi les aliments de base. Cela continue aujourd’hui encore, avec des onigiri qui sont régulièrement confectionnés pendant les pique-niques ou bien incorporés dans les bento (les paniers repas à emporter que l’on prépare généralement à la maison).
Aujourd’hui encore, il existe de nombreux spécialistes des onigiri à Tokyo. Bien que le plat soit disponible sous toutes ses formes et surtout pour tous les budgets, certains se sont spécialisés dans l’onigiri au point d’en faire un argument de luxe. Le plus ancien spécialiste des onigiri à Tokyo est incontestablement l’onigiri Asakusa Yadoroku. Il a été fondé juste derrière le fameux temple Sensoji, en 1954. Depuis, c’est devenu une véritable attraction pour les Japonais et les touristes internationaux, où l’on essaie les plats faits pour le déjeuner, souvent composés d’une soupe miso et de deux onigiri. On peut choisir ses ingrédients préférés, notamment du radis mariné, du poisson salé, des œufs, du saumon, des flocons de bonite séchée ou encore une prune marinée.
Et si jamais vous allez au Japon, n’oubliez pas d’apprendre à bien déballer un onigiri. C’est important, surtout si vous allez en acheter dans des petites supérettes. En effet, le riz est toujours séparé des algues avec une petite feuille de plastique, afin d’éviter qu’ils ne soient détrempés. C’est pratique pour la conservation, mais il ne faut évidemment pas la consommer. Si vous achetez ça dans un konbini, pas de panique, cela s’accompagne souvent d’un mode d’emploi avec des numéros, et vous avez juste à suivre les indications. Mais si jamais vous manquez de temps ou que vous ne savez pas comment faire en situation réelle, voici les trois instructions à respecter :
- Tirez la bande du milieu vers le bas, tout autour vers l’arrière.
- Retirez délicatement la petite manche à droite. Ne soyez pas trop pressé, car vous risquez de casser l’ensemble.
- Une fois que cela est fait, vous pouvez déballer la manche gauche. Ça y est, l’onigiri est prêt à être consommé.