Voilà 75 ans que la Seconde Guerre mondiale a pris fin. En ce qui concerne le Japon, la guerre du Pacifique s’est finalement interrompue après le double bombardement atomique sur les villes de Hiroshima et Nagasaki. Il ne faut toutefois pas oublier que les combats ont duré un peu partout, et des millions d’hommes et de femmes sont morts. Certaines familles ont eu l’opportunité de les pleurer tout en récoltant leurs restes, mais d’autres ont reçu un cercueil vide. Une nouvelle estimation, citée dans les quotidiens japonais aujourd’hui, laisse entendre que plus d’un million de personnes nipponnes sont toujours portées disparues.
La moitié du total
La statistique s’intéresse davantage aux hommes soldats qu’à l’ensemble des Japonais, présent là où les combats ont fait rage. Aujourd’hui, la plupart des experts sérieux s’entendent sur un total de 2,4 millions de combattants japonais morts à l’étranger. La plupart se situent donc sur des îles du Pacifique, éloignées de l’archipel. Pourtant, on en trouve également dans le nord de la Chine (les affrontements remontent à 1931) ainsi qu’en Mongolie ou en Russie.
Plus de 75 ans après, les spécialistes et les archéologues n’ont plus beaucoup d’espoir de dénicher et d’exhumer le reste de ces centaines de milliers de soldats. Les familles, qui sont pour la majorité fortement âgées, ne pourront véritablement jamais retrouver leurs ancêtres et leurs proches. En fait, on estime que seul environ un demi-million sont considérés comme récupérables par les autorités. Les autres cadavres ont été jetés dans la mer, enterrés dans des zones inaccessibles, pour des raisons politiques, militaires ou encore pratiques. Les temps étaient rudes, et les vivants, qu’ils s’agissent des ennemis ou même des Japonais, ne pouvaient pas respecter toutes les coutumes et les rites funéraires.
Quelques initiatives
Au Japon, le Parlement a lancé une énorme initiative en 2016, pour la récupération des dépouilles sur une durée de huit ans. Jusqu’en 2024, les experts se penchent sur la comparaison de l’ADN, notamment en utilisant les données du ministre américain de la Défense. Le pays de l’oncle Sam possède bon nombre d’installations militaires américaines sur des îles du Pacifique Sud, qui étaient autrefois des champs de bataille.
Les comparaisons ADN remontent à 2003, du moins en ce qui concerne l’archipel nippon. Pour les familles, cela représentait un bien maigre espoir, 60 ans après la fin des conflits. À partir de 1943, et les débâcles successives des Japonais dans les îles du Pacifique, le gouvernement a commencé à envoyer ses fameuses boîtes vides. Celles-ci étaient remplies de pierres, elles étaient envoyées aux familles endeuillées.
Par la suite, l’ensemble des soldats de l’armée impériale sans distinction (notamment vis-à-vis des crimes de guerre) sont enterrés dans le sanctuaire de Yasukuni.
Ce n’est pourtant pas la première fois que le Japon essaie de retrouver ses anciens combattants. Dès 1952, après l’occupation américaine de l’archipel, les premiers émissaires étaient envoyés dans plusieurs pays voisins. Une initiative qui a eu le don d’irriter les populations, qui venaient de souffrir de la terrible occupation impériale nipponne. Cependant, la plupart des restes collectés n’ont pas été identifiés, et n’ont donc jamais été rendus aux familles. Environ 10 000 morts de guerre ont été retrouvés, et le projet a failli prendre fin en 1962. Cela n’a tenu qu’à la demande répétée des vétérans, ainsi que des familles.
Aujourd’hui, cette missive gouvernementale n’a récupéré que 340 000 restes. Tous ceux qui ne sont pas encore identifiés, ou qui ne peuvent pas l’être formellement, sont conservés au cimetière national de Chidorigafuchi à Tokyo, qui abritent les restes de soldats inconnus.