L’avortement est une pratique relativement accessible au Japon. Elle n’est que rarement considérée comme une question politique. En revanche, les femmes sont confrontées à de multiples problèmes lorsqu’elles choisissent de se faire avorter.
La légalité de l’avortement au Japon
Le pays du soleil levant est bien différent des États-Unis, qui vient de relancer un débat controversé sur l’accès à la procédure. En effet, la Cour suprême des États-Unis a statué qu’elle ne considérait pas l’avortement comme un droit constitutionnel, revenant sur une décision historique de 1973.
L’avortement est légal au Japon sous certaines conditions. Les défenseurs des droits des femmes relèvent deux principales problématiques :
- les femmes mariées qui souhaitent avorter doivent obtenir le consentement de leur conjoint ;
- la procédure utilisée est coûteuse et périlleuse.
Le processus de l’avortement au Japon se base sur la loi de la santé maternelle, promulguée en 1948. L’avortement peut être pratiqué :
- si la poursuite d’une gestation ou l’accouchement d’un bébé nuira à la santé de la mère pour des raisons physiques ou économiques ;
- si la grossesse met en danger la santé de l’enfant ;
- en cas de viol ;
- si l’enfant est atteint d’une déficience grave.
Dans 99 % des cas, la raison invoquée pour l’avortement est de protéger l’intégrité ou la santé physique de la femme. Cette statistique est parfois utilisée par défaut. Elle est restée constante au fil des années.
Des problématiques législatives
L’avortement au Japon peut être pratiqué quand le fœtus ne survit pas hors du corps de la femme, ou bien lorsque la grossesse a été provoquée par des agressions ou des intimidations sexuelles.
De même, la procédure d’avortement doit être effectuée dans les 21 semaines suivant le premier jour de la dernière menstruation. Surtout, les femmes mariées souhaitant avorter doivent impérativement obtenir le consentement de leur époux.
Il y a bien sûr quelques exceptions, lorsque le compagnon est décédé, est inconnu ou ne peut pas exprimer d’intention pour une quelconque raison. Il n’empêche que le Japon fait partie des 10 seuls pays et régions soumis à cet impératif selon le Center for Reproductive Rights, une organisation mondiale qui cherche à parvenir à la protection des droits reproductifs.
Les femmes célibataires et les femmes qui ont été enceintes par des partenaires violents ou par le viol ne sont pas concernées par l’assentiment de leur conjoint. Malheureusement, la communication des institutions nipponnes est maladroite. La politique n’est pas bien éprouvée du grand public. Les médecins exigent bien souvent la signature d’un homme, de peur d’avoir des retours juridiques.
Une méthode controversée
Il y a eu 145 340 avortements au Japon en 2020. Ces chiffres ont été promulgués par le ministère de la Santé. Ils sont en baisse de 7,3 % par rapport à 2019.
Les pilules abortives ne sont pas en vigueur au Japon. Les différents modèles sont en attente d’approbation. Elle devrait progressivement être autorisée d’ici à la fin de l’année 2022. Ainsi, les femmes ont l’obligation de subir une intervention chirurgicale pour interrompre leur grossesse.
Cela engendre ipso facto un montant financier considérable, qui n’est pas couvert par l’assurance maladie nationale (sauf dans des cas limités). Les opérations d’avortements chirurgicaux effectués au cours des 8 premières semaines de grossesse coûtent environ 100 000 yens (695 euros). Celles qui sont pratiquées au-delà de la 12e semaine peuvent valoir le double !
Conséquence logique, de plus en plus de Japonaises se tournent vers d’autres options, parfois illégales. Certaines ont décidé de faire importer des pilules abortives de l’étranger. Sans consultation ni suivie, cela peut mettre la vitalité d’une femme en danger, selon les experts. Des sanctions pénales sont également appliquées.
À titre de comparaison, l’IVG est prise en charge à 100 % en France dans le cadre d’un tarif forfaitaire avec dispense totale d’avance de frais. La complémentaire santé peut éventuellement prendre en charge tout ou une partie des frais non remboursés par l’assurance-maladie en cas de dépassement d’honoraires. L’IVG chirurgicale est indemnisée par l’assurance maladie à 100 % sur la base d’un tarif forfaitaire variable. Le montant est compris entre 463,25 euros et 664,05 euros en fonction de l’établissement de santé (un hôpital ou une clinique), le type d’anesthésie (générale ou locale) et bien sûr la durée de l’hospitalisation.
La principale méthode utilisée pour l’avortement dans les cas de moins de 12 semaines de grossesse au Japon est la dilatation et le curetage. Selon Kumi Tsukahara, une experte des droits reproductifs associés à la Women’s Studies Association of Japan, elle engendre un taux de complications significativement plus élevé que ses équivalents, comme le procédé d’aspiration sous vide. C’est cette dernière qui est la plus manipulée à l’étranger. On aspire « doucement » pour retirer un embryon par le col de l’utérus.
L’assentiment de la pilule abortive orale pourrait bientôt arriver au Japon. En décembre 2021, LinePharma, une institution britannique, a demandé l’approbation auprès du ministère de la Santé pour apporter ses mifépristone et misoprostol. Ce sont des médicaments employés dans plus de 70 pays et qui sont aujourd’hui considérés comme une méthode sûre et abordable pour provoquer un avortement au début de la grossesse.
Malheureusement, la pilule abortive devrait coûter aux alentours de 100 000 yens selon les médias nippons. Aucun remboursement n’est programmé. L’institut de recherche Guttmacher a d’ailleurs révélé qu’entre 2015 et 2019, seuls 30 % des grossesses non désirées ont été interrompues.
Les pilules contraceptives d’urgence ont finalement été approuvées par le ministère de la Santé, du Travail et des Affaires sociales en 2011. Les effets et les applications sont toutefois limités.
Historique de l’avortement au Japon
Le débat sur l’avortement a bien eu lieu au Japon, principalement dans les années 1970 et 1980. Il n’a cependant pas été aussi médiatisé qu’à l’étranger. Un certain nombre d’organisations religieuses et d’adhérents du parti libéral-démocrate (alors au pouvoir) ont tenté de supprimer la clause de raison économique de la loi sur la protection eugénique.
L’opposition, menée par des groupes de défenses des droits des femmes et des membres des mouvements d’opposition, a fait échouer toutes leurs propositions. Bien que la législation nipponne soit claire à cet effet, l’avortement continue d’être stigmatisé dans la société. Il est largement considéré par une bonne partie de l’opinion comme un péché de la fille ou un signe de mauvaise maternité. Certains vont même jusqu’à l’assimiler au meurtre d’un bébé par sa mère.
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