La grande majorité des Japonais sont minces. Pourtant, la plupart des foyers consomment du riz, des ramen et des udon. Les glucides sont connus pour nous faire grossir, alors pourquoi les Japonais ne sont pas plus gros ? Selon les témoignages de la plupart des observateurs, c’est principalement le mode de vie qui aide les Japonais à rester fins. On trouve des explications dans les habitudes alimentaires, la culture sociale des citoyens nippons, mais aussi dans les us et coutumes. Il faut ajouter à cela une grande espérance de vie qui est directement liée à l’état de santé.
D’un point de vue scientifique, il n’y a aucun débat. On peut notamment se référer à la liste des pays par taux d’obésité, publiée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en 2016. C’est un document remarquable, car il est très explicite. Il nous donne le pourcentage de la population adulte qui est obèse pour chaque pays. Ainsi, les États-Unis d’Amérique se positionnent à la 12e place avec un triste 36,2 % de la population. Du côté de la France, nous nous situons à la 87e place avec 21,6 % de la population. Le Japon, excellent élève, ne se trouve qu’à la 185e place avec seulement 4,3 % de la population qui est en situation d’obésité.
Régime alimentaire
Avant tout, il convient de rappeler que les Japonais ne sont pas une ethnie à part. L’organisme humain des citoyens nippons est sensiblement le même que celui d’un Français ou d’un Américain. Bien sûr, il y a çà et là des dispositions génétiques qui facilitent ou non la prise de poids. Cependant, une personne qui enchaîne les fast-foods matin, midi et soir ne manquera pas de grossir et de prendre des kilos.
C’est notamment le cas dans les grandes villes japonaises, qui pullulent de petits stands ou de chaîne de restauration rapide qui servent de la malbouffe, de la nourriture bien trop chargée en gras et en calories. Et oui, les sumos ne sont pas les seuls « gros » au Japon ! Il n’y a qu’à se balader dans la rue pour en observer. Certes, la proportion est bien moindre qu’en Occident, et c’est ce qui fait la particularité du Japon par rapport à beaucoup d’autres pays développés…
Une affaire de modération
Sans surprise, c’est la nourriture qui est le facteur déterminant dans le poids des Japonais et des Japonaises. La gastronomie nipponne ne se limite heureusement pas aux ramen et aux omelettes de riz. En fait, la plupart des citoyens nippons, qu’il s’agisse des résidents dans les grandes villes ou dans les campagnes, consomment beaucoup de produits de la mer et des légumes. Il y a parfois de la viande rouge et des aliments frits, mais c’est un complément qui n’est pas systématique. Il en va de même pour la volaille qui ne semble pas faire partie intégrante de l’alimentation de base japonaise.
De plus, les portions sont plus modestes dans les assiettes japonaises. Cela concerne tout d’abord la viande, qui a toujours été estimée comme un produit de luxe. Les élevages de masse et les importations effrénées de l’époque contemporaine ont démocratisé les pièces de bœuf, de porc ou de poulet. Toutefois, on observe que la viande paraît être mangée en plus petites quantités et qu’elle sert davantage d’accompagnement que d’un plat principal.
On est donc à l’exact opposé des restaurants en Amérique qui assènent au client des rations XXL ! Vous pouvez par exemple vous rendre dans un McDonald’s au Japon, en France et à New York. Si vous commandez le même menu, alors les portions seront plus minces au pays du soleil levant.
Cuisson des aliments
Contrairement à ce que l’on pourrait penser après s’être rendu dans des restaurants asiatiques japonais en métropole française, les Nippons ne consomment pas fréquemment des aliments frits. Il y a bien sûr toujours un ou deux plats au menu qui emploie cette cuisson. Elle a cependant l’inconvénient d’être beaucoup plus grasse que les autres méthodes. C’est pourquoi bon nombre de restaurants nippons lui privilégient une cuisson à la vapeur. Les Japonais, soucieux de conserver leur lignée et de ne pas manger trop gras, préfèrent bien souvent opter pour cette dernière.
De même, les aliments fermentés sont très généralement présents dans le régime alimentaire d’un Japonais. On pense en particulier au fameux natto, mais on trouve aussi des importations culturelles : la soupe miso chinoise ou le kimchi coréen. Bref, il existe plus d’une dizaine d’aliments fermentés qui contribuent nettement à la perte de poids. Surtout, ils ciblent souvent la graisse abdominale ! Ils sont donc très appréciés chez les hommes et les femmes qui essaient de développer un corps sain avec un ventre plat.
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Les desserts sont sains
Avez-vous déjà essayé les galettes japonaises ou les desserts que l’on peut retrouver dans des épiceries en France ou dans certains restaurants ? S’ils ne sont jamais au niveau de ce que l’on peut trouver directement au pays du soleil levant, c’est un excellent aperçu de toutes les différences entre les desserts occidentaux et japonais. En effet, la touche finale d’un menu au restaurant est souvent composée de riz, de haricots rouges ou d’algues marines.
Cela peut paraître surprenant aux yeux d’un français, mais ce sont bien là les ingrédients principaux de base pour les collations salées et les desserts. Ils ont un goût prononcé et, surtout, ont l’avantage de ne pas être des bombes caloriques comme ce que nous avons l’habitude de consommer après un repas déjà riche !
Gardons toujours à l’esprit qu’un écart ne se traduit pas systématiquement en prise de poids. Cependant, si on ingère deux fois par jour un dessert sain au lieu d’un équivalent trop riche, imaginez la différence sur une année, soit 365 jours ! Et sur deux, cinq ou dix ans ? Ce sont autant de bons réflexes que les Japonais ont dans leur quotidien et qui contribuent à leur grande longévité et minceur.
L'impact de la culture
Comme c’est le cas en France depuis quelques années désormais, il est rare de tomber sur un établissement japonais qui sert des boissons illimitées. C’est bien sûr le cas des Manga Café, mais ce ne sont pas des restaurants à proprement parler. De plus, la plupart des lieux de l’archipel ne proposent pas d’option « à emporter ». Les traiteurs s’attachent donc à offrir une quantité juste pour l’ensemble des clients, de façon à ne rien jeter. La culture des mœurs et l’étiquette japonaise contribuent d’ailleurs à cela : il est très mal vu de ne pas finir une assiette, sous peine de projeter un sentiment de gêne sur le restaurateur qui pensera naturellement que son dîner n’est pas à la hauteur de vos attentes.
Du reste, il est vrai que l’on peut qualifier les Japonais de modérés en ce qui concerne la consommation des denrées. Nous l’avons vu plus haut, la viande, tout comme les graisses saturées sont considérées avec vigilance. Ce sont des accompagnements qui ne sont pas systématiquement présents dans les repas. Les principaux plats de prédilection sont les légumes, les céréales et les fruits de mer. Les produits laitiers, les aliments et boissons salées et sucrées comme les hamburgers et les boissons gazeuses sont moins prisés de la population. Cela est moins exact chez les plus jeunes : la nouvelle génération apprécie, comme à Paris ou New York, de manger gras. Toutefois, rappelons que le Japon est un pays dont la population vieillit rapidement.
Quoi qu’il en soit, l’attitude des Japonais envers la nourriture est radicalement différente de celle que l’on peut trouver en Occident. Aux États-Unis, par exemple, il y a chaque année des dizaines de concours de mangeur. Ce sont des compétitions organisées, parfois à grande échelle, qui servent à démontrer qu’un individu consomme le plus vite possible un aliment. Vous l’aurez deviné, on ne traite ici pas de concombre ou de carottes, mais bien de hamburgers ou de nuggets. La plupart des Japonais ne sont pas (aussi) excessivement enthousiastes à l’idée de manger. Ainsi, une telle considération de la nourriture est inconcevable au pays du soleil levant.
Le Hara hachi bu
Le mode d’alimentation japonais est traditionnellement basé sur le concept de Hara hachi bu. Cela pourrait signifie « mangez jusqu’à ce que vous soyez rassasié à 80 % ». Les penseurs d’antan et leurs fidèles d’aujourd’hui ont la conviction qu’il faut 20 minutes à l’estomac pour envoyer des signaux au cerveau indiquant qu’il est plein.
Ainsi, si l’on consomme lentement sa nourriture et que l’on s’arrête au moment opportun, vous allez naturellement manger moins. Cette philosophie se vérifie dans la pratique. On quitte la table avec un sentiment de satisfaction et non de ballonnements. C’est une attitude vis-à-vis de la nourriture que l’on pourrait prendre comme exemple en Occident, qui est de plus en plus sujet aux phénomènes d’obésité chez les plus jeunes.
Il existe aussi une autre règle du 80%, c’est-à-dire du Hara hachi bu. Le pourcentage pourrait signifier que 80 % du temps, naturellement pour le quotidien, on se doit de recourir à des repas saints et simples. Ceux-ci sont concoctés avec des produits frais et locaux. De cette façon, les Japonais qui suivent cet enseignement évitent la plupart des pesticides, des colorants et surtout des additifs à risque. Bien sûr, c’est une situation rêvée qui est bien plus difficile d’accès pour des foyers pauvres ou lorsque l’on habite dans une grande ville.
Le thé vert
Ce n’est un secret pour personne : les Japonais (et bien d’autres cultures asiatiques) vouent une passion et une fidélité sans faille au thé vert. On le consomme à tout moment de la journée et c’est incontestablement le breuvage le plus populaire de l’archipel. Les Japonaises en sont un peu plus friandes que les Japonais, mais le caractère universel est bien là. Surtout, il remplace les cafés ou les cappuccinos que l’on retrouve dans les habitudes des Français et des Occidentaux.
Un mocha peut apporter jusqu’à 500 kcal ! De son côté, le thé vert n’en contient quasiment aucune. Il faut bien surveiller à ne pas lui rajouter de sucre, ce qui n’entre pas dans les réflexes de la plupart des foyers nippons. Il octroie en outre un pouvoir de détoxication et notre organisme brûlerait environ 80 kcal avec cinq tasses de thé. Bref, encore un comportement sain que l’on retrouve dans la plupart des habitudes japonaises, au travail comme à la maison.
Le thé vert offre aussi cet impact « coup de boost » qui est recherché dans le café. On trouve de la théine qui se révèle même, d’après certaines études, moins agressive pour la santé. En pratique, on peut déjà l’observer : on ne subit pas de palpitations du au stress, les insomnies, les accélérations du rythme et autres effets secondaires qui peut apparaître chez certains. Les plus populaires au Japon sont le Matcha et Oolong, que l’on vous recommande de tester si vous avez la possibilité de les importer !
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Mode de transport
Les personnes qui ont séjourné à Tokyo ou qui ont voyagé à travers l’archipel le savent : les Japonais adorent les transports en commun, et notamment le train. On parle parfois de « culture ferroviaire » pour définir la passion qu’ont les Nippons avec les locomotives et les voies ferrées. Rappelons déjà qu’aux heures de pointe, la plupart des individus n’ont pas la possibilité de s’asseoir. Il faut donc rester debout plus d’une heure et batailler pour se frayer un chemin.
On s’aperçoit surtout, lorsque l’on prend la peine d’ouvrir l’œil, que les Japonais marchent beaucoup. C’est le cas dès le plus jeune âge, avec des enfants qui ne se font que très rarement déposer devant l’école. En fait, selon une étude réalisée en 2008, les Japonais effectuaient en moyenne 18 000 pas par jour. Les Américains, à titre de comparaison, n’en opéreraient que la moitié. La même étude nous confirme que les individus qui accomplissaient le plus d’enjambées avaient l’IMC et le tour de taille les plus bas. Dès lors, on peut en conclure que l’augmentation du nombre de pas quotidiens est une stratégie de santé publique simple, mais efficace pour accroître l’activité physique et ainsi améliorer les résultats sanitaires liés à l’obésité.
Dans le même genre, un nombre croissant de Japonais disposent d’un vélo. On en trouve partout : les écoliers, les hommes d’affaires, les restaurateurs, les personnes âgées, les femmes au foyer pour aller faire des emplettes… une véritable industrie s’est développée depuis l’après-guerre, une période où l’on manquait de tout et en particulier de véhicules thermiques.
Le vélo traditionnel des Japonais est souvent livré avec des casiers ou des paniers. Cela aide à y disposer des acquisitions (notamment pour les femmes au foyer) ou des cartables (pour les étudiants). Les régions montagneuses et plus reculées, propices à des ascensions ou à des itinéraires sportifs, bénéficient aussi de vélo de course ou de cross.
Enfin, on observe surtout à Tokyo l’arrivée des bicyclettes électriques ces dernières années. Les services de location sont nombreux et attractifs. Même en tant qu’étrangers, on économise une somme parfois considérable en optant pour une réservation de vélo par rapport aux transports en commun. Surtout, cela nous permet de dépenser de l’énergie et de faire travailler notre corps de manière saine !
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La pression de la société
La question de la minceur et du poids au Japon est intrinsèquement liée à la perception d’autrui. Ne nions pas ici que les Japonais recherchent la conformité, l’harmonie et la réussite du groupe. Ils voient d’un mauvais œil tout corps étranger ou individu de la société qui ne fait pas comme les autres. Bien sûr, cette approche est à prendre avec des pincettes, et il ne faut pas en effectuer une généralité.
Cependant, les témoignages des personnes en surpoids au Japon ont tendance à corroborer ces craintes : lorsque l’on est « gros », au Japon, on a tendance à se faire remarquer et on se sent très vite mal à l’aise. La pression, souvent silencieuse, mais appuyée, est terrible. De façon surprenante, les Japonais sont assez directs concernant le physique, du moins entre eux. Ils n’hésiteront pas à vous rappeler que vous avez pris du poids, notamment les parents et les proches.
On trouve sur Internet de nombreux exemples qui sont aussi confirmés par ce que l’on entend de la part d’amis japonais. En allant se faire masser à Osaka il y a quelques années, un Japonais a eu un compliment que l’on jugerait déplacé de la masseuse. Elle a dit « ça doit être dur pour vous ». Bien entendu, elle ne pensait pas à mal et ne songeait pas que sa phrase puisse heurter la sensibilité d’un individu. Mais cela en dit long sur la perception des Nippons sur la question du poids. À l’instar de la considération de barbe et la pilosité faciale, il est fréquent que les Japonais associent l’obésité avec une mauvaise hygiène, un régime alimentaire bancal et un manque d’exercice physique.
Puis, lorsque l’on se rend dans un magasin japonais, il ne faut pas s’attendre à découvrir des rayons entiers de grande taille. Il en existe, c’est vrai, et l’on peut juger qu’ils sont en augmentation. Toutefois, il convient de se tourner vers des boutiques spécialisées qui l’indiquent noir sur blanc. La plupart des grosses enseignes ordinaires ne proposent pas vraiment de longueur pour les personnes en surpoids.
On ne trouve pas non plus son bonheur dans les konbini, les modestes supérettes de proximités qui sont ouvertes 24 heures sur 24. Les étagères fournissent des chemises, des sous-vêtements, des T-shirts qui peuvent dépanner, mais les tailles sont bien trop minces. Tout cela incite vraisemblablement les Japonais à surveiller leur poids, car cela peut constituer un désagrément pour le shopping.
Le poids idéal selon les Japonaises
La question de l'IMC
En conclusion de cet article, nous pouvons aborder rapidement un aspect très recherché chez la Japonaise citadine : la perfection physique. On nomme cela le Taijû (体重). Les deux kanji signifient « corps » et « poids ». Cette notion diffère légèrement de l’IMC, l’indice de masse corporelle universelle qui nous renseigne sur notre poids. S’il est inférieur à 25, nous ne sommes pas en surpoids. Les Japonaises préfèrent évoquer le « poids de la santé », le « poids de la beauté », le « poids de Cendrillon » et le « poids de mannequin ».
Ce sont des catégories de poids qui permettraient, selon les Japonaises, de viser un type de physique en particulier. Par exemple, le poids de la santé (健康体重, kenkô taijû) est l’objectif pour celles qui recherchent une bonne santé. Il équivaut à un IMC entre 20 et 22. De son côté, le poids de la beauté (美容体重, biyô taijû) est plus ambitieux. Les femmes qui l’atteignent sont considérées comme plus jolies (bien que cela soit subjectif, bien entendu). Cela répond à un IMC entre 18 et 20. Le poids de Cendrillon (シンデレラ体重, shinderera taijû) coïncide à un IMC de 18, que l’on qualifie plutôt de maigreur en Occident. Pour finir, le poids de la catégorie mannequin (モデル体重, moderu taijû) est assez explicite : cela correspond à un IMC de 17 ou moins !
Ces catégories sont estimées comme des objectifs pour certaines Japonaises. Attention cependant, car les deux ultimes paliers relèvent davantage de la maigreur que d’une bonne condition physique. C’est pour cela que les coachs sportifs, organismes de la santé et associations alertent sur ces deux derniers paliers. Toutefois, cela illustre bien une course à la maigreur qui est parfois entamée par les plus jeunes générations. Le standard de beauté est systématiquement rattaché au poids, en Occident et peut-être plus encore au Japon…
Grossophobie ?
La grossophobie désigne la discrimination envers les personnes en surpoids. Le Japon est souvent considéré comme un pays très à cheval sur la question du poids. Depuis quelques années notamment, les entreprises et des administrations japonaises ont pour obligation de mesurer le tour de taille de leurs employés lorsqu’ils ont entre 40 et 74 ans. L’obésité est ainsi théoriquement illégale.
Le gouvernement japonais a établi lui-même un tour de taille maximum de 85 cm pour les hommes et de 90 cm pour les femmes. L’ambition derrière cette législation est de combattre le syndrome métabolique, c’est-à-dire l’obésité au niveau du ventre. Elle conduit, selon les études, à du diabète et des maladies cardiovasculaires. Le déroulé de ces examens se réalise dans le cadre de visite médicale annuelle.
Pour autant, peut-on parler de grossophobie lorsque l’objectif est de préserver l’état de santé des employés ? Chacun se fera sa propre opinion. Ce qui est certain, c’est que l’on observe une montée du surpoids chez les jeunes Japonais et notamment les hommes.
Les statistiques parlent d’elles-mêmes : en 1997, quelque 23 % des Japonais de 20 ans et plus étaient en surpoids. Une vingtaine d’années plus tard, le chiffre atteint plus de 30 %. Selon les scientifiques, cela relève des récentes habitudes occidentales qui se sont peu à peu immiscées dans le quotidien des nouvelles générations…