À l’occasion de l’entrée dans la nouvelle ère impériale, les Japonais devraient bénéficier de nouveaux congés payés. Mais une écrasante majorité de la population refuse catégoriquement de les prendre. Explication.
Quand le travail est sacré au Japon…
Vous le savez probablement, mais le rapport entre les Japonais et leur travail est assez unique dans le monde. Et avec l’intronisation d’un nouvel empereur, c’est tout un processus qui doit être suivi par ses sujets, ou plutôt sa population, ce qui est fait avec bonne humeur pour le moment. Les Japonais sont heureux, enthousiastes, mais également inquiets. En effet, ce changement d’ère impériale va octroyer un congé inédit de 10 jours consécutifs, du jamais-vu dans l’archipel.
C’est ainsi que 45 % des Japonais se disent mécontents de cette nouvelle. Pour bien comprendre, il faut savoir que cela concerne la « Golden Week« , cette semaine de jours fériés qui débute le 27 avril et qui a lieu chaque année. Mais en 2019, avec les événements dynastiques, elle a été rallongée de trois jours et s’étendra jusqu’au 6 mai. Seuls 35 % des Japonais se disent satisfaits de ce prolongement…
Certains se disent même perdus. Avec 10 jours de vacances d’un seul coup, les Japonais n’ont pas l’habitude de prendre de telles vacances. D’ailleurs, selon les chiffres du ministère du Travail, l’an passé, seuls 9 jours sur les 18 jours de congés octroyés – en moyenne – ont été pris.
Quels seront les secteurs ouverts pendant cette semaine ?
Garderies, crèches et centres pour enfants seront fermés. Les parents auront la responsabilité de leurs enfants trois jours supplémentaires. Les banques seront aussi closes, ce qui obligera tous les clients à retirer du liquide, car les distributeurs pourraient vite se retrouver à court de billets.
Concernant les commerces, pas d’inquiétude puisqu’ils resteront majoritairement ouverts. D’ailleurs, l’économie du Japon va bénéficier de cette dizaine de jours fériés, car les activités économiques devraient faire un bond.
L’activité qui devrait le plus en bénéficier, ce sont les tour-opérateurs. Les agences de voyages vont effectivement battre leur plein, dans une semaine qui est déjà très prisée par les Japonais cherchant à partir en vacances. Mais avec trois jours de plus, les destinations peuvent être plus intenses, plus éloignées, et sur une plus longue durée. Le chiffre d’affaires devrait atteindre des records.
Est-ce que cela abîme déjà l’image du nouvel empereur ?
Pas du tout. Et même si les Japonais sont habitués à une relation très stricte et de dur labeur avec leur travail, l’écrasante majorité de la population se dit enthousiaste avec le nouvel empereur. Si 22 % de la population se dit indifférente quant à la nouvelle succession impériale, quasiment aucun Japonais n’éprouve de l’hostilité. Même si l’abdication de l’empereur Akihito est une chose inédite dans l’époque contemporaine, elle a été très bien accueillie par les Japonais.
D’ailleurs, à la différence de nombreuses monarchies constitutionnelles européennes, il est toujours interdit de dire du mal de l’empereur. Alors évidemment, le pouvoir impérial n’a plus sa force d’antan pour censurer des médias ou mettre en prison tous les contestataires. Mais certains journaux, notamment ceux à scandale, ont rapporté qu’il y avait une certaine pression pour ne pas critiquer l’institution impériale en public. Par exemple, en 1961, un extrémiste avait pénétré dans la maison du patron de la maison d’édition d’un roman, qui avait été jugé trop critique. Il avait notamment poignardé sa gouvernante. Puis, en 1990, c’est le maire de Nagasaki lui-même qui avait été blessé par balle, après avoir estimé que l’empereur Hirohito, le père d’Akihito, était en partie responsable de la Seconde Guerre mondiale.
Globalement, comme nous l’avons dit, le seul élément qui pourrait faire débat à propos du nouvel empereur est le coût financier de la cérémonie. Car le financement provient des fonds publics de rites religieux, et plusieurs centaines de citoyens Japonais, majoritairement des chrétiens et des moines bouddhistes, ont engagé des poursuites judiciaires contre le gouvernement. Selon eux, cela coûterait d’une part trop cher, et c’est également totalement contraire au principe de séparation entre la religion et l’État…