Shintoisme

Le Shintoïsme (神道), également appelé Shinto (la voix des dieux), est une religion animiste propre au Japon qui existe depuis des milliers d’années. Le shinto a des ascendances très antiques. Le Kojiki, considéré comme le plus ancien livre d’histoire du Japon, contient plusieurs mythes japonais liés au shinto. Par ailleurs, le terme Shinto apparaît pour la première fois dans le Nihon shoki, compilé en 720. L’origine réelle de la foi remonterait à la préhistoire, plusieurs siècles auparavant.

Le shinto est une confession qui a progressivement fusionné des croyances mythologiques primitives avec des influences étrangères. Les adeptes estiment que les esprits de la nature (les montagnes, les rochers) peuvent être sacrés. La croyance est basée sur la conviction que les dieux (les kami) résident dans toutes les choses sur terre. Il est fondé sur le culte des ancêtres et de la nature, et vénère une multitude de divinités connues sous le nom de « huit millions de dieux ».

Un kami est un esprit sacré qui prend la forme de choses et de concepts essentiels de la vie. Il y a donc des divinités liées à la pluie, à des montagnes, au vent, à des arbres, ou encore à la fertilité. Il n’y a pas vraiment de limites en ce qui concerne cet aspect. De même, des humains très importants peuvent devenir des kami après leur mort. Ils sont ensuite vénérés par leur famille en tant que kami ancestraux. Ils peuvent également être consacrés par certains sanctuaires s’ils ont joué un rôle déterminant dans l’histoire d’une confession ou du pays.

L’empereur est estimé comme un descendant d’Amaterasu Omikami, la plus haute des huit millions de divinités. C’est pourquoi les cérémonies impériales sont conduites dans le style shinto. Dans la croyance shintoïste, les personnes décédées sont considérées comme des divinités ancestrales qui veillent sur leurs familles et leurs descendants dans l’au-delà. Alors que la plupart des religions du monde, comme le bouddhisme et le christianisme, sont « monothéistes », le shinto est fondé sur l’idée de « polythéisme ». D’ailleurs, le mot « huit millions » (yayorozu) est une métaphore pour désigner le très grand nombre de divinités.

Usage

Le shintoïsme n’est pas une conviction fondée sur un prophète comme Jésus-Christ ou Mahomet, ou les écritures sacrées comme la Bible ou le Coran. Il combine des approches confessionnelles traditionnelles avec des croyances et des attitudes de vie qui sont en accord avec ses pratiques. Aujourd’hui, on observe plus facilement le shinto dans la vie sociale du peuple japonais et dans ses motivations personnelles que dans un modèle de croyances pures. Il est étroitement lié au système de valeurs japonaises et aux modes de pensée du peuple.

Le shintoïsme est une religion optimiste, car les humains sont estimés comme fondamentalement bons. Le mal est censé être causé par des esprits maléfiques. On ne considère pas qu’il y a un paradis et un enfer, tout comme il n’y a pas de biens ou de mal absolu. Personne n’est parfait et les failles sont omniprésentes. Il faut apprendre à vivre avec et ne pas se laisser influencer par ces fameux esprits malfaisants. Le but de la plupart des rituels shintos et ainsi d’éloigner les mauvais esprits par la purification, mais aussi par les offrandes aux kami et les prières.

Les valeurs fondamentales du shintoïsme sont les suivantes :

La pureté : l’idée de pureté dans le shintoïsme est omniprésente. L’idée est que la pureté repousse le mal (kegare). Il ne s’agit donc pas seulement d’impuretés physiques, mais aussi d’énergie, et celles-ci sont traitées par des rituels de purification.
La sincérité (makoto) : la sincérité du cœur donne du sens à tous vos actes. On l’associe à la bonté.
Le bien-être physique : on pense qu’être bien dans son corps conduit à mener à de belles actions envers ses semblables.
L’harmonie avec la nature : les divinités du shintoïsme sont présentes partout, y compris dans la nature. Il est donc important de garder les lieux propres et d’être conscient de son environnement. Il y a aussi une forme de communion avec celui-ci.

De nombreux rituels shintos sont encore pratiqués de nos jours. Par exemple, lors d’un mariage typiquement japonais, le couple boit 3 fois dans une coupe de saké. Ce geste symbolise leur union éternelle. De même, lorsque l’on visite un sanctuaire, il faut entrer par le Torii, mais aussi en ressortir (pour passer du monde des humains vers celui des dieux, puis de ce dernier vers celui des humains). Il n’est donc pas rare de voir certains locaux éviter volontairement de passer sous le Torii s’ils ne prévoient pas de revenir par le même chemin.

Sanctuaire

Les espaces publics dans lesquels les kami (les dieux) sont vénérés sont souvent connus sous le terme de jinja, des sanctuaires. Les anciennes traductions les désignaient parfois sous le terme de temple, un mot désormais réservé aux structures bouddhistes du Japon. On dénombre environ 100 000 sanctuaires publics au Japon, dont 80 000 sont membres de l’association des sanctuaires shintoïstes. 20 000 ne sont pas affiliés. Certaines caractéristiques naturelles et des montagnes peuvent parfois être considérées comme des sanctuaires.

Ces lieux de culte se trouvent dans tout le pays, du nord au sud. Ils existent à la fois dans les zones rurales isolées, mais aussi dans les zones métropolitaines très denses. À Tokyo, par exemple, on peut en observer. On les identifie aisément par la couleur rouge qui domine. Autrefois, ils n’étaient que des autels rocheux sur lesquels on disposait des offrandes. Peu à peu, des bâtiments ont été construits autour, en s’inspirant généralement de l’architecture des entrepôts de riz au toit de chaume. L’architecture chinoise a grandement influencé les édifices depuis la période Nara.

L’entrée d’un sanctuaire est marquée par un portique surmonté d’une ou deux traverses. C’est une porte très reconnaissable qui est appelée Torii. Il en existe au moins 20 styles différents. Ce point d’entrée est généralement considéré comme une délimitation entre une zone « de tous les jours » et l’espace où réside le kami. Passer sous un Torii est ainsi associée à une forme de purification. On observe la plupart du temps une corde sacrée avec un papier plié sur la partie haute du torii. C’est un ornement qui a pour mission d’éloigner les mauvais esprits, qui apporteraient du malheur sur les fidèles et l’enceinte.

À l’intérieur du sanctuaire, on retrouve un autel. Il comporte systématiquement un objet ou une relique qui symbolise le kami local. En effet, chaque sanctuaire a été édifié en honneur à une divinité. Les Japonais planifient si souvent leur visite en fonction du bienfait qu’ils poursuivent en explorant un sanctuaire. Par exemple, il est courant de visiter des divinités liées à la fertilité si un couple cherche à avoir des enfants. On positionne ensuite des offrandes sur l’autel du lieu, afin qu’elles soient reçues par le kami.

Les éléments d’un sanctuaire classique sont :

Le torii, une porte d’entrée sacrée
Le honden, qui contient une image du kami du sanctuaire
Le goshintai, un objet sacré à l’intérieur du honden qui est investi de l’esprit du kami
Le sando, le chemin sacré qui fait le lien entre le torii et le haiden
Le heiden, un bâtiment accueillant les prières et les offrandes
Le saisenbako, une boite qui accueille les offrandes d’argent
Le temizuya, un abreuvoir en pierre qui sert à la purification rituelle
Le kaguraden, un pavillon pour la danse rituelle et la musique

La majorité des sanctuaires célèbre régulièrement des fêtes que l’on nomme matsuri. Elles servent à se rassembler, mais surtout de montrer aux divinités le monde extérieur. Le shintoïsme comprend des prêtres qui vivent le plus souvent sur le terrain du sanctuaire. Contrairement au christianisme, les femmes peuvent aussi devenir prêtres. La profession n’interdit pas le mariage et la procréation.

Les prêtres sont identifiables avec leur longue robe ivoire et leur couvre-chef noir. Ils sont essentiels au fonctionnement de chaque sanctuaire, car ils agencent la pratique des cérémonies. Ils sont en général aidés par des femmes plus jeunes (miko) lors des rituels et détails locaux. On les reconnaît facilement, car elle porte un kimono blanc. Elles doivent traditionnellement être célibataires et sont souvent les filles des prêtres.

Histoire

Le shintoïsme pratiqué depuis la Préhistoire, selon de nombreuses sources. Mais c’est à la fin du VIe siècle après J.-C. que le nom shinto a été consacré pour désigner cette religion indigène. L’objectif était de la distinguer du bouddhisme et du confucianisme, de doctrine qui avait été introduite en provenance de la Chine. Le shinto a été vite éclipsé par le bouddhisme et les dieux indigènes étaient généralement considérés comme des manifestations de bouddha. Les prêtres bouddhistes sont devenus les gardiens des sanctuaires shinto et ont peu à peu intégré leurs propres ornements, rituels et images religieuses.

A la fin du VIIIe siècle et au début du IXe siècle, le célèbre maître japonais Kukai établit une doctrine unissant le bouddhisme et le shintoïsme sous le nom de Ryobu Shinto (le shintoïsme des deux genres). Le bouddhisme dominait le shintoïsme, et des éléments ont été adopté du confucianisme. L’ancienne approche du shinto proprement dit a pratiquement disparu et n’a été maintenue que dans quelques grands sanctuaires, ainsi que dans le palais impérial. Les empereurs eux-mêmes sont même devenus bouddhistes par la suite.

À partir du XVIIIe siècle, le shinto a été relancé en tant que religion nationale importante. Les écrits et les renseignements d’une succession d’érudits notables, dont Mabuchi, Motoori Norinaga et Hirata Atsutane ont convaincu un grand nombre de Japonais. Ces hommes étaient motivés par des sentiments nationalistes. Il y avait une forme de rejet de toutes les pratiques d’origine étrangère à cette époque, et le shintoïsme apparaissait comme une idéologie respectant parfaitement l’Antiquité japonaise. En 1867, le shogunat est renversé et l’empereur est rétabli à la tête du gouvernement. Une doctrine shintoïste directement relancée : elle devient la religion d’État officielle.

Après la Seconde Guerre mondiale, le shintoïsme et l’État ont été officiellement séparés.