La préparation, la présentation et la consommation des aliments est aujourd’hui une expérience ritualisée à la fois dans l’esthétique et dans le domaine culinaire. Il n’y a pas d’autres domaines dans la vie des Japonais qui n’est plus soigneusement prescrit ou ritualisé que le simple fait de manger. La beauté de la nourriture, la complémentarité artistique de la vaisselle, le caractère formel du service et les tickets de repas étaient autrefois considérés comme les plus hauts niveaux d’expression culturelle. Ils étaient révélateurs du caractère et du raffinement d’une personne.
Les repas ritualisés ont été généralisés à l’ensemble des Japonais par une politique qui a débuté dans les années 1600. Surtout, le 3e shogun Tokugawa a mis en place une politique de « présence alternée » dans les années 1630. Elle forçait les puissants seigneurs provinciaux à garder leurs familles à Edo (l’actuel Tokyo). Inévitablement, un flux constant de visiteurs se rendait dans la capitale impériale et en revenait à pied tout au long de l’année. Les seigneurs de clan bien entendu, mais aussi leur garde rapprochée ainsi que leur serviteur.
Les auberges ont progressivement été construites sur le long des routes très peu de temps après. Il y avait des établissements de luxe (pour les seigneurs et leur serviteur personnel), des auberges de première classe (pour leur serviteur de rang supérieur) et des auberges ordinaires (pour les fantassins et les serviteurs de rang inférieur). Le système de fréquentation alternée a perduré pendant 250 ans et a surtout servi à diffuser des repas de styles depuis la cour dans des milliers d’auberges du pays mais aussi dans des restaurants et chez de riches marchands.
Baguettes
Les baguettes (o-hashi) forment la base de l’étiquette alimentaire japonaise. L’idée est de s’en servir comme des pinces pour saisir des morceaux de nourriture. Il existe de nombreuses façons de les tenir, différentes des procédés chinois ou sud-coréens.
Les Japonais dégustent leur bol de riz en l’utilisant comme plateau ou « filet de sécurité ». On le saisit et on le porte près du menton pendant que l’on déguste. Cela permet de facilement porter les aliments à votre bouche avec des baguettes. Il est aussi courant de tenir sa main libre sous le morceau de nourriture que l’on porte à sa bouche avec votre baguette. C’est une pratique particulièrement utile lorsque l’on déguste quelque chose de relativement grand et lourd comme des sushis.
En parlant de ce poisson cru, il n’y a rien de mal à le déguster directement avec la main. C’est pour cela que l’on vous fournit généralement un petit chiffon humide (o-shibori) dans les auberges traditionnelles et les restaurants de sushis. Il est employé pour s’essuyer les mains avant et après avoir mangé.
Pour en revenir aux baguettes, les Japonais ne s’attendent pas à ce qu’un visiteur étranger les manipule de façon parfaite. En revanche, il y a quelques tabous à respecter :
- Ne pas les planter dans le riz et les laisser debout
- Ne pas utiliser ses propres baguettes pour se servir dans un plat commun
- Ne pas découper ses aliments avec ses baguettes
- Ne pas utiliser de baguettes dépareillées
- Ne pas pointer quelqu’un avec ses baguettes
- Ne pas lécher ses baguettes
- Ne pas pousser ses plats avec ses baguettes
- Ne pas remuer son plat avec ses baguettes
- Ne pas croiser ses baguettes
- Ne pas tenir ses baguettes d’une main pendant que vous buvez de l’autre
Lorsque vous avez fini d’utiliser vos baguettes, vous devez les placer dans des petits supports en céramique ou en bambou. Certains établissements ne fourniront pas de support. Dans ce cas, il faut appuyer vos baguettes sur le côté d’un plat ou d’une soucoupe. Après avoir fini de dîner, vous devez poser des baguettes sur le dessus de votre plat principal, de votre assiette ou de votre bol. Les dîners de haut rang et officiels exigent de poser des baguettes lorsque l’on est servi.
Restaurant
Il est généralement très facile de commander un plat dans un restaurant japonais, même en ne maîtrisant pas la langue de l’archipel. La plupart des établissements proposent aujourd’hui des répliques en cire de tous les plats qu’il propose. Celles-ci sont généralement disposées dans des vitrines extérieures ou sur des tables installées à cet effet. Elles ont l’avantage d’être très authentiques, ce qui permet à chaque nouvel arrivant d’identifier le met qu’il souhaite déguster. Les répliques sont tout le temps étiquetées : il peut s’agir du nom et de son prix, ou d’un simple numéro d’identification.
Le client est généralement accueilli par l’expression « irasshaimase » en entrant dans un restaurant. Cela signifie « bienvenue, veuillez entrer ». En général, le serveur vient à votre rencontre et vous demande combien de personnes sont dans votre groupe. On vous conduit alors à une table et on vous apporte un menu.
La plupart des restaurants japonais proposent aujourd’hui des tables et des chaises de style occidental. Cependant, certains établissements ont conservé la tradition des tables basses traditionnelles avec des coussins pour s’asseoir sur le sol en tatamis. Il y a certains cas où les deux formules sont proposées et c’est à vous de choisir. Le style zashiki (coussins à même le sol) nécessite de retirer ses chaussures à l’entrée.
Il est interdit de fumer dans les restaurants au Japon depuis une loi d’avril 2020. Seuls quelques petits établissements antérieurs à cette loi peuvent autoriser le tabagisme, à condition de le mentionner sur un panneau à l’entrée.
Repas
Après avoir reçu le menu, c’est le moment de commander. Interpellez le personnel du restaurant en disant « sumimasen » (excusez-moi) ou appuyez sur le bouton d’appel de la table. Il n’est pas rare que le serveur répète votre commande afin de s’assurer qu’il n’y a pas une incompréhension.
On dit « Kanpai ! » avant de boire, au moment de trinquer. Il ne faut surtout pas prononcer « chin chin », expression utilisée par les Japonais pour qualifier le pénis.
Les repas au Japon commencent traditionnellement par le mot itadakimasu (い た だ き ま す). La signification est similaire à notre bon appétit. En réalité, les Japonais expriment leur gratitude envers tous ceux qui ont joué un rôle dans la préparation de la nourriture. Cela concerne les cuisiniers, mais également les agriculteurs et même l’ensemble des organismes vivants qui ont donné leur vie pour faire parti du repas.
Le riz est également soumis à plusieurs règles distinctes :
- Il ne faut pas mélanger de la sauce avec son riz blanc. On le déguste comme tel.
- Il ne faut pas donner une forme ronde à son riz. C’est une pratique réservée au bol de riz de bouddha.
- On doit soulever le bol avec la main opposée à celle qui tient les baguettes. On l’approche ensuite de notre bouche. Il ne faut pas se pencher vers la table pour déguster son riz.
À la fin d’un repas, on utilise l’expression polie gochisō sama-deshita ((ごちそうさまでした). Celui ou celle qui a préparé le repas répond traditionnellement osomatsusama-deshita (おそまつさまでした).