Parapluie japonais – L’indispensable accessoire

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Le parapluie se dit kasa 傘 en japonais. On parle de hi-gasa 日傘 pour évoquer une ombrelle. On observe des centaines de ces accessoires se déployer en même temps quand vient la saison des pluies. Le modèle transparent demeure le plus utilisé et le moins onéreux. Dans un pays où les bonnes manières sont si élevées, transporter un parapluie envoie un signal positif aux autres.

Cet outil pratique du quotidien est employé tout au long de l’année par les Japonais. L’État peut se vanter de posséder le plus grand nombre de parapluies par habitant au monde, avec une moyenne de 3,3 contre 2,4 dans le reste du globe. On sort avec pour aller au travail, durant l’été, mais aussi en automne et en hiver pour se prémunir des précipitations. On préfère recourir à un autre type en saison chaude qui s’apparente à une ombrelle. Il permet de se défendre contre les rayons de soleil. Une importante proportion des Japonais apprécie ne pas avoir la peau bronzée.

☂️ Un accessoire anodin

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Beaucoup de Japonais ont pris l’habitude de toujours transporter un parapluie avec soi. On en trouve cependant dans la quasi-intégralité des modestes boutiques de proximité comme les konbini. Des formules bon marché sont régulièrement proposées pour des tarifs allant généralement de 300 à 800 yens. Certains magasins les commercialisent même à 100 yens ! La majorité est confectionnée en série dans la Chine voisine et est ensuite expédiée au Japon pour leur utilisation à grande échelle. Plus de 130 millions de modèles ont été vendus en 2019, dont 80 millions en plastique jetable.

La variante transparente est la plus populaire et souvent la moins onéreuse. Son manque de personnalité et sans doute son triste défaut. Il est si banal que l’on ne s’en estime jamais réellement propriétaire. Certains amalgament. On trouve toujours un porte-parapluie auprès des portes d’un magasin. Il est de coutume de le déposer pour ne pas salir les allées de la boutique. Les Japonais empoignent presque machinalement un parapluie en sortant, et ils confondent !

D’aucuns diront que les Nippons sont de véritables voleurs de parapluie. On pourrait quasiment parler de sport national tant cela s’est généralisé à l’époque contemporaine. C’est heureusement le seul délit qu’ils se permettent de perpétrer… précisons toutefois que si vous disposez d’un exemplaire haut de gamme ou empreint d’une certaine personnalité, il ne sera pour ainsi dire jamais dérobé. La logique s’applique aux modèles qui peuvent être confondus et qui ne valent pas très cher. C’est le caractère banal qui encourage les « abjects » agresseurs à commettre un larcin volontaire et prémédité.

Une partie des habitants obéit à une sorte de code de l’honneur du parapluie. L’idéologie voudrait que l’on puisse s’emparer d’un modèle dans une boutique à condition de le replacer un jour dans la corbeille d’un autre, généralement de la même chaîne. L’accessoire est alors relégué au rang de bien commun, mis à la disposition des citoyens. Cela permet surtout de déculpabiliser de son geste. Si une minorité de personnes applique cette philosophie de vie, l’importante majorité n’y pense plus dans les minutes qui suivent leur vol.

Certains résidents ont décidé de prendre les devants et de tracer des kanji (idéogrammes japonais) de malédiction sur la poignée du parapluie pour dissuader les malfrats. Les habitants ne manquent pas d’imagination et de multiples formules ont été inventoriées sur les réseaux sociaux. Certains artistes se sont saisis de cette tendance pour dessiner des visages effrayants sur des modèles vendus à plusieurs milliers de yens. Il paraît même qu’un propriétaire résolu aurait logé une puce électronique GPS dans le manche afin de retrouver les malfaiteurs potentiels.

🙌 Un compagnon du quotidien

Les parapluies transparents sont évidemment populaires pour le confort qu’ils apportent. Les cyclistes ne diront pas le contraire. Ceux qui s’adonnent aux balades nocturnes dans les immenses villes non plus. Un modèle translucide est en cela en tout point similaire avec une voiture décapotable. On peut y observer le paysage, contempler à 360° les néons de Tokyo et ne jamais se sentir enfermé sous un couvercle. Ils sont certes pratiques, mais ils ne riment pas toujours avec durabilité.

Les grands modèles de parapluie semblent très en vogue au Japon. Ils offrent la plus importante couverture. Certains atteignent jusqu’à 70 cm. Leur envergure les dessert néanmoins lorsque le vent souffle trop fort. Les Japonais ont le goût de se référer à la météo chaque matin avant d’aller au travail ou à l’école.

Véritables ustensiles du quotidien, le parapluie possède ses propres infrastructures dédiées. Nous avons évoqué ci-dessus les corbeilles disséminées çà et là dans les rues et devant les installations. Quelques bâtiments (certains musées, aéroports, stades) vous permettent de verrouiller votre accessoire avec une clé. Des stations sèchent en un clin d’œil votre parapluie, comme on le ferait avec nos mains. Des technologies que l’on adorerait expérimenter dans certaines régions françaises… Elles sont pour l’essentiel situées dans les immeubles professionnels ainsi que les centres commerciaux à plusieurs étages.

Il est interdit et surtout dangereux de tenir un parapluie pendant que vous faites du vélo. Vous trouverez des portes-parapluies (傘ホルダー kasa horuda) dans la majorité de magasins spécialisés ainsi que sur Internet. Ils sont très en vogue, car ils vous préservent tout en vous libérant la main porteuse. Ils ne coûtent que plusieurs centaines de yens (pour les modèles les plus abordables). Certains préfèrent investir dans un manteau résistant la pluie. Le Japon est sans surprise le pays de l’imperméable !

Histoire du parapluie

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Si l’on considère généralement que le premier parapluie pliant est né à Paris en 1705 par Jean Marius, le premier modèle authentique aurait été conçu au premier siècle en Chine. L’empereur Wang Mang, également fondateur de la dynastie Xin aurait créé un parapluie parasol démontable. À cette époque, l’objet était rivé sur un chariot lors des cérémonies religieuses. Leur introduction au Japon date d’environ 1500 ans.

Ce parapluie artisanal était appelé kinugawa. Il était rudimentaire : un auvent, tendu sur un cadre en bois, fixé au-delà d’un grand bâton. On employait déjà de la soie. Rouge qui plus est, le symbole du pouvoir impérial. Quelques modèles étaient agrémentés des emblèmes et les couleurs de la famille.

Les parapluies individuels se sont démocratisés à l’ère de Kamakura (1185-1333). On pouvait les manier lors des faibles précipitations ou les chutes de neige. Mais ils présentaient une lacune : ils n’étaient pas véritablement imperméables. Les artisans ont corrigé ce défaut majeur à partir du XIVe siècle. Les auvents étaient traités avec des cires et des huiles végétales. Les parapluies se sont dotés d’une grande polyvalence et pouvaient être manipulés au fil des saisons. Plusieurs modèles ont vu le jour et des créateurs ont perfectionné un art en devenir.

Les professionnels au Japon auraient inventé la technologie pour plier le wagasa dès le XVIe siècle. La période Edo (1603-1868) constitue une ode aux parapluies : les estampes Ukiyo-e fleurissent en phase de paix. L’ustensile s’inscrit vite dans l’iconographie populaire. Les représentations de scènes de citoyens ou de nobles se protégeant des averses ou de chutes de neige avec des parapluies se comptent par dizaines.

L’accessoire devient rapidement omniprésent à travers le pays du soleil levant. Il évolue, aussi. Les créations sont plus pratiques et davantage légères. Du papier huilé est employé. Le parapluie wagasa fait son apparition. Il se distinguait d’abord par les matériaux utilisés : du bambou, du papier washi, du bois, que du naturel ! Surtout, le processus de conception était plus fastidieux. Un modèle nécessitait plusieurs mois pour être construit. L’auteur doit vérifier la longueur des nervures de bambou, les coller avec du papier traité au jus de kaki… l’usage de peinture, d’huile et de vernis requit énormément de patience. La dernière étape consiste à sécher le parapluie. Cela devient une habitude pour son futur utilisateur. Cette conception artisanale a du bon : la durée de vie d’un wagasa pouvait excéder la décennie.

Le règne des Tokugawa est typiquement analysé comme une phase fructueuse pour l’accessoire. Des millions de formules étaient confectionnées chaque année dans le Japon. En plus des nombreux ouvriers spécialisés, on remarque que certains samouraïs se sont mis à fabriquer des parapluies. Cela leur offrait une source de revenus dans une période de paix. L’activité était aussi considérée noble. La démocratisation des wagasa les a finalement banalisés. Leur usage s’est diffusé dans tous les domaines artistiques comme le kabuki (théâtre traditionnel nippon) ou les cérémonies de thé chanoyu. Les geishas ne font pas exception et flânent presque constamment munies d’un parapluie-ombrelle.

La restauration de Meiji (1868-1912) est une époque singulière. Elle correspond à l’ouverture du Japon aux grandes puissances étrangères. Le pays s’occidentalise. Il importe des parapluies européens dont les différences et les coloris séduisent les Nippons. La demande de wagasa traditionnels décline. Les conceptions artisanales subsistent comme l’un des principaux symboles de la culture nipponne classique. On en retrouve aujourd’hui dans les mariages folkloriques, les cérémonies du thé, les spectacles de kabuki ou dans les mains des maiko. Le quartier de Kano à Gifu est le plus important centre de fabrication national de wagasa. À la fin du XIXe siècle, la ville confectionnait 520 000 exemplaires par an. Les années 1950 seront encore plus déterminantes avec 15 millions de parapluies manufacturés chaque année. Il y avait plus de 600 ateliers en activité à Gifu. Il ne subsiste malheureusement plus que trois aujourd’hui. Ils façonnent quelques milliers de modèles à l’année. Cela constitue tout de même 70 % de la production nationale.

Certains ouvriers opèrent encore à Kyoto. L’avenir de ce parapluie demeure très incertain. Il ne restait plus que 20 artisans dans tout le pays à la fin de 2019… Il apparaît que cet accessoire folklorique rencontre moins de succès que nos célèbres parapluies de Cherbourg. Acheter un wagasa à Kyoto ou Gifu permet de promouvoir ces professionnels invétérés qui font perdurer les traditions.

Le ban-gasa

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Le 番傘 ban-gasa est un type de parapluie japonais. La poignée est en bambou et les matériaux solides permettent de fabriquer un accessoire de qualité et d’une robustesse étonnante. Les premiers modèles remontent à l’époque d’Edo. Il est surtout utilisé par les hommes japonais qui sont séduits par sa simplicité sans fioritures et son efficacité. Ils servent parfois de décoration dans certains restaurants japonais. Accrochés au plafond, ces parapluies font d’excellentes ornementations dans un style rustique.

Le janome-gasa

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Le 蛇の目傘 janome-gasa est un autre type de parapluie japonais. Son manche est en bois. La poignée est enroulée avec du rotin. On trouve des centaines de motifs différents en papier washi. Ils servent à s’abriter des précipitations, mais sont largement employés comme décoration intérieure. Il est utilisé par les hommes et les femmes, bien que la dernière catégorie en soit certainement plus consommatrice.

Les ombrelles japonaises

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Les ombrelles japonaises (日傘 hi-gasa ou 舞傘 mai-gasa) ne sont pas étanches. Elles ne conviennent pas sous un temps pluvieux et sont surtout manipulées lors des promenades estivales. Le papier washi n’est pas renforcé et cela lui procure de l’authenticité dans ses couleurs. Les motifs peints ou teints ressortent davantage. La lumière du soleil brillante traverse légèrement le washi. Ce sont de véritables objets d’élégances qui sont encore utilisés pour la décoration intérieure de style japonais dans certains établissements.

📝 Vocabulaire japonais du parapluie

Français Japonais Prononciation
Parapluie kasa
Ombrelle 日傘 hi-gasa
Parapluie traditionnel rouge 和傘 wagasa
Pluie ame
Pluie brumeuse 霧雨 kiri same
Pluie diluvienne 大雨 ooame
Saison des pluies 梅雨 tsuyu/baiu
Typhon 台風 taifu
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