Surprise, le Japon envisage d’introduire la garde partagée après divorce

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La garde partagée des enfants en cas de divorce des parents n’existe pas légalement au Japon. C’est un véritable combat du quotidien. Il est fréquent que l’ex-conjoint, qui n’a pas la garde de son enfant, ne soit même pas autorisé à le voir, ne fût-ce qu’un week-end. Le pays du soleil levant est aujourd’hui confronté à une augmentation du taux de divorce. De quoi pousser un sous-comité du ministère de la Justice à proposer l’introduction d’un système de garde conjointe pour les couples séparés.

La problématique de la garde exclusive

La situation juridique alarmante pour le parent qui n’obtient pas la garde de l’enfant est imputée au Code civil japonais. Il stipule la surveillance exclusive et monoparentale pour les couples divorcés. Le projet provisoire de la révision du droit civil sera porté par le sous-comité d’ici au mois d’août. Il doit ensuite recueillir les réactions du public sur la question avant de poursuivre vers des discussions finales. Il y a de bonnes chances pour que cette révision soit adoptée.

Contrairement à ce que l’on entend parfois, la garde partagée existe au Japon. Elle se limite cependant aux ménages mariés. L’enfant n’est légalement rattaché qu’à l’un des parents en situation de divorce. Le pays du soleil levant est rattrapé par sa faible natalité et le taux des séparations qui explose. Ces dernières années, environ 200 000 couples mariés divorcent chaque année au Japon, soit un sur trois !

De quoi engendrer des problèmes sociaux prépondérants. La déconnexion des échanges entre l’héritier et le géniteur non-gardien a été montée en épingle dans la presse par les affaires qui ont éclaté. Souvent, il n’est pas possible de voir son enfant jusqu’à sa majorité. De plus, le non-paiement de la pension alimentaire reste un fléau qui pénalise la procédure de divorce.

Une évolution des mentalités

Comme toujours au Japon, les changements juridiques varient en fonction des époques. Ils sont portés par des tendances de l’opinion publique. L’avancement social des femmes et la participation croissante des hommes à l’enseignement des petits jouent une responsabilité majeure dans l’introduction de la garde partagée pour les couples divorcés. Des voix estiment qu’il est imprudent d’abandonner le rôle de parents après un divorce et de couper la relation avec l’enfant.

Une enquête menée le 8 février 2022 l’atteste. Environ 50 % des répondants déclarent que les deux parents divorcés doivent être impliqués dans l’éducation de leur enfant. Dans le détail, 11,1 % ont indiqué que c’était « souhaitable dans tous les cas » et 38,8 % ont réagi que c’était « souhaitable dans de nombreux cas ». Plus de 90 % répliquent par l’affirmative si l’on inclut les 41,6 % des sondés qui ont choisi « souhaitable si des conditions particulières existent ».

Rappelons que la garde conjointe à la suite du divorce est une pratique usuelle dans beaucoup de pays. Le Japon est en retard, comme dans bien d’autres aspects sociaux. La population est parfaitement au courant de cette absence législative : 89,4 % se disent conscients du système de garde exclusive après la séparation. Les multiples batailles pour la garde et les cas « d’enlèvement d’enfants » de ces dernières années ont sensibilisé l’opinion publique. C’est un contexte atypique dans lequel l’un des parents s’empare d’un enfant sans le consentement de son ex-partenaire. Avec la protection de la loi, l’autre parent n’a aucun recours.

La situation est encore plus critique si l’un des deux parents est occidental ou plus généralement étranger. Les enfants kidnappés au Japon font l’objet de dizaines d’articles dans les médias. Les associations dénoncent le non-respect par l’État des droits fondamentaux des enfants. Les dossiers sont retentissants : les avocats français mobilisent la commission des affaires juridiques du Parlement européen pour demander la suspension de l’accord de partenariat stratégique signé en 2018 entre l’Europe et le gouvernement nippon.

Le cas de Tommaso Perina a ébranlé l’opinion publique italienne. Cet expatrié au Japon se bat depuis 6 ans pour revoir ses enfants. Les tribunaux du pays attribuent à coup sûr et exclusivement les enfants au parent qui détient les petits au moment de la séparation. Rapidement, des centaines de témoignages similaires se sont multipliés en Europe. Au final, des milliers de parents seraient concernés.

Quelle évolution attendre ?

Le quotidien Mainichi a eu accès à des sources proches du dossier. Selon elles, la proposition du ministère de la Justice permettra aux parents divorcés de choisir la garde conjointe par eux-mêmes.

La justice aura aussi le pouvoir de trancher dans certains cas : par exemple, lorsqu’elle jugera qu’il est dans l’intérêt supérieur de l’enfant que les deux parents continuent à participer à son éducation. C’est une fantastique avancée qui récompense l’effort de milliers de pères et de mères du monde entier.

Le système de garde conjointe envisagée permettrait aux deux parents de bien réfléchir et de prendre des décisions pour leur enfant. Plusieurs secteurs seront mis sur la table :

  • son éducation ;
  • son avenir ;
  • la manière dont une maladie est traitée ;
  • la gestion de ses vacances scolaires ;
  • les droits et libertés de chaque parent ;
  • les horaires attribués à chaque visite.

Il est intéressant de revenir sur l’enquête gouvernementale rapportée au début du mois de février. En plus de se prononcer sur la garde partagée après un divorce, les sondés devaient indiquer les domaines qui devaient faire l’objet de décision réciproque. Voici les réponses :

  • 58,5 % pour les plans de traitement en cas de maladie grave ;
  • 53,3 % pour l’éducation et les parcours professionnels ;
  • 32,4 % pour le lieu de résidence de l’enfant ;
  • 12,8 % pour l’emploi de l’enfant.

Dans la mesure où l’opinion publique japonaise semble en phase avec cette avancée sociale, il est probable que la proposition soit avalisée par la justice. Il faudra toutefois surveiller l’application réelle de cette nouvelle option.

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