Le Japon est le pays qui accepte le moins de réfugiés par rapport aux autres membres du G7… et de loin

Parmi les nombreuses problématiques géopolitiques contemporaines, le statut de réfugié a émergé comme étant l’une des principales. Nous vivons toujours dans un monde en guerre, ravagé atrocement dans certains endroits du globe, entraînant malheureusement des milliers de réfugiés en tout genre. Si la question est souvent soulevée en France dans les débats politiques et sociétales, intéressons-nous maintenant à ce même segment mais au sein de l’archipel nippon. Très conservateur comme vous le savez probablement, le Japon est l’un des pays les plus développés au monde, mais ne délivre que très peu ce statut.

Les chiffres officiels

Au fil des années, le nombre de candidats au statut de réfugié augmente, sans cesse. Les données du ministère de la Justice que vous pouvez retrouver sur ce tableau ci-dessous issu de Nippon.com nous le montre très bien. Depuis 2009 et ses 1398 candidats, nous sommes alors aujourd’hui à 10 493. Et si ce nombre de candidats avait multiplié par plus de 10 en 2017, le nombre de réfugiés qui ont obtenu leur statut reste quasiment le même au fil des années. Il n’augmente pas en adéquation avec le nombre de candidatures.

En 2018 donc, le dernier chiffre que nous avons, 42 personnes ont donc obtenu le statut de réfugié. 13 sont originaires de la république démocratique du Congo, cinq du Yémen ou encore de l’Éthiopie. C’est plutôt étonnant car nous nous attendions à trouver beaucoup de réfugiés chinois, victimes du régime policier. Aujourd’hui, au Japon, le statut de réfugié n’est pas complètement reconnu. En parallèle, quelques permis de séjours spéciaux accordés pour des raisons humanitaires, notamment alimentaires et sanitaires, sont délivrés. Si en 2009, plus de 500 avaient été délivrés, le nombre a constamment diminué pour atteindre seulement 40 en 2018.

Pourquoi le Japon reconnaît aussi peu de réfugié ?

Japan Association for Refugees, une organisation indépendante japonaise pour les réfugiés, avait mené une étude en 2016. Elle avait pour but de comparer les différents pays du G7, notamment sur leur nombre de réfugiés acceptés mais également sur le taux de reconnaissance, par rapport au nombre de demandes dans chaque pays. L’Allemagne arrivait alors en tête avec 260 000 réfugiés, et un taux de reconnaissance de plus de 40 %. La France, elle, avait accepté 24 000 réfugiés avec un taux de reconnaissance de 21 %.

Alors évidemment, le but de cette démarche était de comparer ces résultats avec les chiffres du Japon. Et nous sommes obligés de nous montrer surpris (au moins par l’extrémité de ce faible nombre) du fait que dans le pays du soleil levant, seulement 28 réfugiés avaient été acceptés, ce qui nous donne un taux de reconnaissance… de 0,3 %. Contribuer à la protection des réfugiés n’entre donc pas dans la politique nationale japonaise.

Devant de telles accusations, le ministère de la Justice nipponne a répondu. Il a tout de même indiqué que 55 % des demandes de statut de réfugié proviennent de cinq pays, à savoir Népal, Sri Lanka, Cambodge, Philippines, et Pakistan, et que ces pays-là ne présentent pas de « problème particulier ». Tout l’art du dédouanement, curieuse manière de procéder quand l’on sait que le Népal est, par exemple, l’un des pays les plus pauvres du monde, et l’un des moins développés. Le Sri Lanka, deuxième exemple de cette liste, est un pays ravagé par les conflits politique, qui était jusqu’alors plongé dans un état d’urgence. On apprend également plus sur la nature des demandeurs de cet asile, car le ministère nous explique que parmi l’ensemble des candidats, 50 proviennent de premiers pays du monde. Cela nous donne donc 33 % des demandes qui proviennent des pays les plus riches au monde.

Que penser de tout cela ?

En 2017, il y a eu plus de 20 000 demandes d’asile au Japon. Un an plus tard, ce nombre a diminué de moitié. Comment expliquer ce phénomène ? Principalement dans le durcissement du processus d’examen, notamment concernant les demandes frauduleuses de travail. Auparavant, un demandeur d’asile pouvait travailler pendant six mois au Japon, après avoir présenté sa demande. L’archipel estimait que des difficultés financières pouvaient retarder un tel paiement, et permettait un long processus de demande, qui se traduisait souvent par six mois de travail, avant de retourner dans son pays. Mais à partir de janvier 2018, tout ce système a été modifié.

À présent, tous les documents officiels des candidats qui émettent une demande de réfugié, que ce soit de nature politique ou humanitaire, sont vérifiés dans les deux mois suivant leur soumission. Il faut également savoir que travailler sans avoir obtenu son statut officiel est de moins en moins possible, et le Japon s’attache à faire respecter ces règles-là

Quoi qu’il en soit, le nombre de réfugiés que le Japon accepte est très inférieur à ses homologues du G7. Géographiquement isolé et culturellement très homogène, le Japon ne représente pour la plupart pas une destination évidente. Mais depuis 1981, le Japon a pourtant signé la Convention des Nations unies sur les réfugiés, et a également fait promulguer sa propre loi sur la reconnaissance d’un statut de réfugié. Comme nous vous l’avons dit précédemment, ce statut demeure encore assez flou par rapport à celui instauré dans les grandes puissances occidentales, mais il a le mérite d’exister. Les taux de reconnaissance demeurent alors encore faibles, et obtenir son permis de travail est de plus en plus difficile.

Le Japon est donc un pays signataire de la convention de Genève depuis une trentaine d’années. Malgré ce statut, le pays peine à mettre en place une politique d’asile digne de la troisième plus grosse économie au monde. Ces dernières années, elle s’est même radicalement compliquée, et des problématiques sont fréquemment soulevées au Japon pour définir certaines populations étrangères sur le territoire, comme les Indochinois dans les années 1970 et 1980 : sont-ils des réfugiés ou de simples migrants ?

Dans les années 2000, un semblant de tournant de la politique d’asile semblait être en marche, mais la réforme juridique de 2004 n’a eu qu’un faible impact. On pourrait également citer plein d’exemples de demandeurs d’asiles qui n’ont jamais été acceptés malgré un dossier relativement solide. Aucun demandeur d’asile kurde de Turquie n’a par exemple obtenu dans l’histoire du Japon ce statut de réfugié. Un exemple est certainement celui du 17 janvier 2005, quand une famille de demandeurs d’asile kurde de nationalité turque a été expulsée par le gouvernement japonais, alors qu’ils étaient présents depuis 1990 sur le territoire. Menacé et discriminé, chassé dans son pays originel, le père s’était alors enfui au Japon et avait fait venir sa famille pour travailler. Mais après deux demandes d’asile sans succès, l’affaire a été portée devant la justice par la famille, mais la finalité est accablante. On vous laisse regarder l’intégralité du résumé de cette affaire sur ce site.

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