Au Japon, cette application qui combat les frotteurs dans le métro bat des records de popularité

Si vous ne le saviez pas déjà, le nombre d’agressions sexuelles au Japon dans les transports publics est un des plus hauts de la planète. Le département de la police nationale au Japon a émis un rapport en 2017, qui faisait état de plus de 1750 agressions sexuelles et attouchements en tout genre, dont près d’un tiers qui survennaient entre sept heures et neuf heures du matin, les heures de pointe. Les solutions mises en place ne sont que trop peu efficaces, et c’est dans cette optique qu’une application a vu le jour au Japon. Elle permet ainsi de lutter contre les agresseurs dans le métro. Explication.

Un engouement phénoménal

Dès sa sortie, l’application a trouvé rapidement un large public. Comme vous pouvez l’imaginer, la très large majorité des utilisateurs ayant téléchargé cette application est composée de femmes. Plus de 237 000 téléchargements ont été réalisés depuis sa sortie, ce qui est considéré comme un « chiffre inhabituellement élevé » d’après Keiko Toyamine, une responsable du département de la police japonaise, pour un programme de service public. Car oui, tout cela est le fruit d’une initiative publique qui fait écho à la recrudescence des agressions sexuelles dans les transports publics japonais.

En revanche, les auteurs de l’application estiment que ce n’est que la partie émergée de l’iceberg. Les femmes n’osent pas témoigner, ni même se manifester dans la plupart des cas. La mise en place d’une application permettant l’anonymat, et consistant en la signalisation d’incident permet en revanche à ces femmes d’agir sans pour autant se dévoiler.

Plusieurs applications avaient déjà été lancées

C’est la police de Tokyo qui avait lancé cette application, et il faut remonter à 2016 pour en trouver les premiers balbutiements. Répondant au nom de Digi Police, elle prend la forme d’une application de sensibilisation, et informe les personnes âgées et les familles nombreuses sur les risques, mais également sur certaines techniques pour se protéger des personnes mal intentionnées.

Peu de temps après, suite à la demande de nombreux utilisateurs, une nouvelle fonction s’attaquait cette fois-ci aux hommes qui commettaient des agressions sexuelles dans les transports publics. Deux fonctionnalités sont principalement utilisées : premièrement, en cas d’agression sexuelle, vous pouvez ouvrir l’application et appuyer sur un bouton qui émettra un cri puissant prenant la forme d’un « stop » (prononcé par une voix féminine) qui avertira toute la rame de l’agression que vous subissez. Dans le même temps, une deuxième fonctionnalité permet de faire apparaître un message d’aide sur votre téléphone, afin d’avertir tous vos voisins, en silence, si vous considérez que la première solution pourrait vous mettre en danger.

Cette application a connu un franc succès, et le nombre d’abonnés augmente d’environ 10 000 chaque mois. Cette popularité démontre la peur des victimes pour appeler à l’aide, tout comme elle démontre l’inaction et le comportement lâche des hommes et des voyageurs qui ferment les yeux sur ce genre d’agression. Certains évoquent également le fait qu’au Japon, il est très mal vu de discuter dans les transports en commun, de communiquer de manière générale, et que l’ensemble des passagers a généralement les yeux rivés sur le téléphone, ou est en train de dormir.

Des peines lourdes… qui ne dissuadent pas

Si de tels actes sont constamment commis depuis des dizaines d’années, les peines ont progressivement pris en ampleur. Concrètement, une personne qui est arrêtée durant un tel type d’agression sexuelle (au stade de l’attouchement) risque six mois de prison, assortie d’une amende pouvant aller jusqu’à 4000 € (500 000 ¥). De plus, si des menaces de mort, ou des violences physiques sont commises, la peine peut s’aggraver rapidement et atteindre les 10 ans de prison ferme.

Devant un tel phénomène de société navrant, tous les partis au Japon ont essayé de proposer des solutions plus ou moins radicales afin d’endiguer ce fléau. En commençant par les compagnies ferroviaires, qui sont accablés par les plaintes quotidiennes des passagères qui ne peuvent prendre un transport en commun sans subir d’attouchements sexuels. Ainsi, plusieurs wagons réservés uniquement aux femmes ont été mis en place, afin de limiter les risques au mieux.

Dans certains cas au Japon, il est rapporté que certaines femmes malintentionnées tirent profit de cette situation, et accusent injustement un homme de les avoir attouché, avant de lui proposer un règlement à l’amiable, c’est-à-dire par le biais d’un versement de liquide, afin de ne pas le dénoncer. En réponse à cela, certains hommes ont également demandé à ce que des wagons soient réservés aux femmes, mais également aux hommes, afin d’éviter de fausses accusations.

Sur Internet, où l’anonymat permet une communication sans limite, les femmes japonaises peuvent se livrer et s’échanger des techniques sur divers forums. Si le Japon a manqué le coche de #MeToo, nous avons la sensation que le pays prend de plus en plus conscience de la nécessité de réaliser des avancées concrètes dans le relationnel entre les composants de cette société, encore très conservatrice.

Si cette application téléchargée plus de 230 000 fois permet de diminuer le problème et surtout d’apporter des premières solutions, il faudra bien plus d’initiatives pour entériner définitivement ce fléau de la société nipponne. Globalement, c’est la mentalité nationale qui doit changer, les normes doivent évoluer vers des dogmes beaucoup moins sexistes, ce qui passe notamment par l’éducation des hommes dès le plus jeune âge.

Source : RTL

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