Le papakatsu : la relation « pour papa » des jeunes Japonaises

Aujourd’hui sur FuransuJapon, nous abordons un type de relation bien spéciale qui est souvent associée au Japon : le papakatsu. En français, cela pourrait se traduire par « activités pour papa ». Phénomène relativement récent, il fait référence à une activité dans laquelle des jeunes femmes « jouent » avec des hommes de l’âge de leur père contre un soutien financier. Comprenez : des étudiantes, collégiennes ou dans la vingtaine, sortent avec des hommes dans la quarantaine et la cinquantaine. On ne parlerait pas ici de prostitution, puisque cet échange n’implique pas, à la base, une prestation sexuelle. D’ailleurs, la partie « katsu » fait référence aux activités de club (« bukatsu ») que les collégiens et les lycéens pratiquent dans leur établissement scolaire. Mais dans les faits, la frontière est presque absente.

La théorie du papakatsu

Comme souvent avec ce genre de pratique nouvelle, les sources ne sont pas nombreuses, tout comme les témoignages. Les personnes pratiquantes ne veulent évidemment pas ébruiter l’affaire, que ce soit pour les hommes d’âge mûr ou les jeunes femmes qui souhaitent se faire un peu d’argent de poche. Cela dit, au Japon, les motivations des deux parties sont facilement identifiables. Faisons un rapide tour des deux points de vue :

Premièrement, le point de vue de l’individu masculin d’âge moyen ou plus âgé. Pour lui, elle n’est pas mineure. Juridiquement, ce n’est pas une relation problématique, il peut donc avoir des relations plus ou moins intimes avec des jeunes femmes si cela lui chante. Il profite d’un avantage (l’argent) qui fait office d’attirance pour conquérir des femmes. Si les relations sexuelles ne sont pas une condition préalable, on se doute quand même qu’elles sont assez courantes. Mais pour certains, trouver une personne à l’écoute, passer du temps après le travail ou pour faire des activités, c’est suffisant.

Deuxièmement, le point de vue de la jeune femme. Souvent étudiante, elle cherche à sortir avec un homme qui octroi de l’argent de poche. A la manière d’un un salaire, chaque échéance est le moment d’obtenir un petit pécule qui permet de vivre confortablement sa période sans travail, à l’école. En d’autres mots : se faire entretenir. Dans certains cas, les donations seraient extraordinataires, et permettraient de se payer les sacs les plus luxueux des grandes marques françaises, voir des appartemments dans les beaux quartiers de Tokyo. De quoi en faire rêver certaines ! Il existe même une pensée assez courante au Japon qui voudrait qu’un homme jeune (donc étudiant) n’a aucune virilité, car il n’a pas de pouvoir économique (pas de salaire). Cette croyance totalement bancale pousse certaines jeunes femmes à chercher des personnes bien plus âgées pour un gage de crédibilité.

Qu’en est-il dans la réalité ?

Sans surprise, dans la réalité, les Japonais comme le reste du monde perçoivent le papakatsu comme des rencontres tarifées. On reçoit généralement un choc quand une personne de notre entourage nous l’annonce. La situation préoccupe beaucoup de parents ainsi que les autorités, car elle s’est étendue aux lycéennes et aux collégiennes. Auparavant, le papakatsu concernait essentiellement les femmes dans la vingtaine. L’une des causes de cette augmentation, c’est la pandémie de coronavirus. Elle a contribué à une augmentation significative du nombre d’étudiantes pratiquant le papakatsu. En effet, de nombreux emplois qui employaient ces jeunes femmes ont dû fermer : restauration, hôtellerie, etc. En réponse, elles ont dû chercher une alternative immédiate et fonctionnelle pour décrocher un peu d’argent. Dans le même temps, les hommes d’âge mûr ont émis des demandes croissances pour combler leur solitude. Mais une fois sortis de la COVID-19, les tarifs ont baissé, puisque les hommes ont repris le travail (VS. le télétravail et la distanciation sociale). La situation est donc pire qu’avant pour les pratiquantes du papakatsu : les hommes qui demandent leurs services se montrent exigeants dans leurs conditions. Les demandes sont abusives, souvent à la limite de la prostitution, les tarifs sont bas. Les femmes, elles, finissent par céder, ce qui engendre un cercle vicieux toxique.

Les limites de cette relation sont multiples : comme nous l’avons indiqué ci-dessus, les hommes et les femmes trouvent habituellement des raisons pour se retirer et mettre fin à cette mauvaise passe. Les hommes se rendent compte que leurs conquêtes n’en sont pas, et que la partenaire est avant tout motivée par l’argent. De leur côté, les femmes craignent la prostitution, les prestations sexuelles, et le phénomène de dénigrement qui est induit. Certaines applications sont développées spécifiquement pour encourager ces pratiques en mettant en place des filtres et une modération des échanges. Cependant, elles ne sont pas suffisamment poussées pour endiguer les abus du phénomène. Pire, certaines semblent les inciter avec une limitation de l’âge maximal des femmes pouvant s’inscrire à 40 ans. Il devient évident qu’il ne s’agit que d’une forme de prostitution, sous un autre nom, pour faire passer la pilule.

Enfin, il existe certaines Japonaises qui désirent le statut social avant tout. On les appelle les filles de Minato City (Minato-ku joshi), en référence aux quartiers luxueux comme Minato. Elles cherchent à vivre dans des appartements de standing grâce à l’apport financier d’hommes fortunés, rencontrés en particulier via des relations de papakatsu. Cela peut également se faire dans des soirées organisées et rémunérées, les « gyaranomi ». Il est évident que vivre en tant que femme seule à Minato, l’un des quartiers les plus riches du pays, est mission impossible. Le papakatsu est l’un des seuls moyens pour y parvenir. Malheureusement, cet idéal de vie que certaines chérissent encourage ces relations papakatsu.

Déclinaison féminine et scandales

Dans cet article, nous nous sommes intéressés au papakatsu, mais sachez que le Japon dispose aussi de la forme inverse : le mamakatsu. C’est la déclinaison féminine, où des femmes d’âge mûr entretiennent de jeunes hommes en échange d’une relation. L’un n’est pas mieux que l’autre, et on peut s’attendre aux mêmes excès toxiques et abus. Mais il semblerait que cela soit beaucoup moins courant. En plus, on trouve nombre d’exemples d’arnaques. Des intermédiaires vont par exemple promettre de fausses rencontres en échange d’un paiement. D’autres témoignages indiquent que les « mamakatsu boys » sont finalement facilement lâchés lorsqu’ils perdent leur attrait physique. Rien de surprenant donc quand on réalise la dimension purement superficielle du mamakatsu, ou du papakatsu. Que ce soit une lycéen ou une lycéenne, les deux ont les mêmes gênes financières, et aspirent tous les deux à la richesse. Pas étonnant donc que certains aussi se fassent avoir par le mirage du gain facile.

Ce qui est tout à fait concret en revanche, ce sont les nombreuses affaires en lien qui ont éclatées ces dernières années dans la presse japonaise et les médias. Par exemple, un féminicide le 8 mai 2024 d’une femme de 25 ans qui avait soutiré 10 millions de yens à un homme de 51 ans contre une promesse de mariage. Ce dernier l’a tué. Cinq ans plus tôt, en 2019, Yuno Morita, une étudiante de l’Université Jochi, révèle avoir eu une relation financière avec Yasuhiro Ozato, le ministre japonais de l’Agriculture. Même topo avec Takeru Yoshikawa, un député du PLD (Parti Libéral-Démocrate, la droite japonaise au pouvoir) qui a été contraint de quitter son parti après avoir été exposé dans une histoire de papakatsu en 2022. Enfin, un homme de 30 ans a aussi été attiré dans un parc, menacé et dépouillé par un groupe se faisant passer pour les proches d’une fille impliquée. De nombreuses arnaques existent et sont parfois considérées comme illégales au Japon : paiement promis, mais jamais effectué, utilisation de fausses cartes bancaires, disparition après promesse d’une compensation financière…

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